Plus tard encore, le Quiétisme aboutit à mépriser l’activité et à condamner les “œuvres”. Certains quiétistes soutenaient l’inutilité de la mortification et des pénitences, qui excitent les sens plus qu’ils ne les calment. Molinos soutient même, ce qui suscita des accusations relatives à ses moeurs, qu’il est inutile de résister aux tentations: qu’importent les souillures de la partie inférieure et sensible de l’âme quand la partie supérieure contemple Dieu et l’aime d’un pur amour? (Paul avait déjà décelé cette conclusion abusive quand il demandait au Romains : “Nous faut-il donc demeurer dans le péché afin que la grâce abonde ?” Rm 6, 1. Et pourtant Paul est catégorique : “Nous estimons en effet que l’homme est justifié par la foi, indépendamment des œuvres de la loi. ” Rm 3, 28
La dépossession des œuvres mènerait-t-elle alors au libertinisme moral ou à l’oisiveté spirituelle ? Loin de là. Paul dénonce toute une série d’actes immoraux et de dérèglements : idolâtrie, impureté, injustice, querelles, perversité, dépravation etc. Rm 18- 32, des aberrations qui étaient d’ailleurs également condamnées par la littérature juive et stoïcienne. Mais ce qui compte pour Paul n’est pas ce que l’on fait, mais la motivation ou le modèle selon lequel on agit. Les Juifs condamnaient l’immoralité comme incompatible avec Dieu, les stoïciens la regardaient comme contraire à la raison et destructrice de l’homme.
Ce qui est absolument nouveau chez Paul, c’est qu’il ne condamne pas ces péchés au nom de la Loi ou de la raison humaine, mais au nom d’une personne: Jésus de Nazareth, crucifié et ressuscité. C’est la personne du Christ qui, dans l’Esprit, est le modèle pour nous humaniser. Il ne s’agit pas de rejeter la vie naturelle et terrestre. Au contraire, il s’agit de laisser opérer la vie du Christ dans toutes les sphères de la vie humaine, car toutes les catégories sont enclavées dans le fait qu’on est gracié du Christ. Pour Paul, le fondement de la nouvelle morale, est un attachement total et inconditionnel à Jésus Christ et son but une revitalisation de l’humain par le réalisme de la Résurrection.
Revenons donc à notre question du début : Que faire ? La réponse est une autre question: Avec qui, en qui, et pour qui faire tout ce que nous faisons ? C’est une invitation à vivre le carême comme un temps intense d’union au Christ, un carême d’union. Une union qui nous rend en même temps libres : “Je sais vivre dans la gêne, je sais vivre dans l’abondance. Je peux tout en Celui qui me rend fort.” Ph 4, 12
Pour la prière, voici quelques cris du cœur de Paul, glanés dans ses lettres. Que l’Esprit Saint vienne les éclairer et les féconder au fond de notre cœur.
- Je m’élance pour tâcher de le saisir, parce que j’ai été saisi moi-même par Jésus Christ. Phil 3, 12
- Mais oui, je considère que tout est perte au regard de ce bien suprême qu’est la connaissance de Jésus Christ mon Seigneur Ph 3, 8
- Qui nous séparera de l’amour du Christ ? Rm 8, 35
- Si nous vivons, nous vivons pour le Seigneur ; si nous mourons, nous mourons pour le Seigneur Rm 14, 8
- Revêtez le Seigneur Jésus Christ Rm 13, 14
- Je suis l’imitateur de Christ 1 Co 11, 1
- Tout m’est permis, mais tout ne convient pas 1 Co 6, 12
- S’il me manque l’amour, je suis un métal qui résonne, une cymbale retentissante 1 Co 13,1
- Ma vie présente dans la chair, je la vis dans la foi au Fils de Dieu qui m’a aimé et s’est livré pour moi Ga 2, 20
- Lorsque je suis faible, c’est alors que je suis fort 2 Co 12, 10
- Pour moi, vivre, c’est le Christ, et mourir un gain Ph 1, 21
- Ce qui manque aux détresses du Christ, je l’achève dans ma chair Col 2, 24
- Je porte en mon corps les marques du Christ Ga 6, 17
- Quant au fondement, nul ne peut en poser un autre que celui qui est en place: Jésus Christ 1Co 3, 11
- L’amour du Christ nous étreint à cette pensée qu’un seul est mort pour tous 2 Co 5, 14
- Mettons notre orgueil en Dieu par notre Seigneur Jésus Christ par qui maintenant nous avons reçu la réconciliation Rm 5,11
- Justifiés par la foi, nous sommes en paix avec Dieu par notre Seigneur Jésus Christ Rm 5, 1
- Vous n’avez pas reçu un esprit qui vous rende esclaves et vous ramène à la peur, mais un Esprit qui fait de vous des fils adoptifs et par lequel nous crions : Abba, Père Rm 8, 15
- L’Esprit lui-même intercède pour nous en gémissements ineffables Rm 8, 26
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