Notice nécrologique de Marc Deneckere

Marc est né à Courtrai le 16 janvier 1932 dans une famille très chrétienne et pratiquante. Le père tenait un commerce de charbon en gros. La famille comptait onze enfants. Marc a fait les humanités gréco-latines au collège Saint-Amand dans sa ville natale. En septembre 1952 il entra chez les Pères Blancs à Boechout, où son frère cadet et filleul Jo le suivra quelques années plus tard. Marc fait le noviciat à Varsenare et les études de théologie à Heverlee, où il prononce son serment missionnaire le 5 juillet 1958 et est ordonné prêtre le 2 février 1959 par Mgr. Geeraerts. Dès le début de sa formation Marc se fait remarquer par sa grande bonté, son cœur d’or (avec le danger de se laisser exploiter). Il est toujours de bonne humeur, toujours content, serviable, fort dévoué pour les travaux manuels. C’est un confrère agréable, très simple dans ses relations, plutôt taciturne, un peu timide. “Sera à l’aise dans la brousse et dans une mission à gros efforts physiques”.
Après les six mois de cours à l’université de Louvain en guise de service militaire, Marc part le 5 avril 1960 pour l’Ituri au Nord-Est du Congo, trois mois avant l’indépendance. Pendant les premiers mois dans le diocèse de Bunia, il apprend la langue kilendu à Pimbo et à Fataki. Il est ensuite nommé vicaire à Jiba. En 1964 il se trouve en plein dans la grande insurrection des Simbas. “Avec bon nombre de pères et de soeurs nous sommes enfermés durant tout un mois dans une école et un couvent des Soeurs d’Ingelmunster”. Jusqu’à leur libération et évacuation par des paracommandos. Il ne l’oubliera jamais. Début juillet 1965 il est de retour à son poste à Jiba, où il construit le couvent des soeurs. A partir de 1970, d’après ses propres dires, il est successivement curé dans trois paroisses, chaque fois par hasard pour dix ans, avant de passer le gouvernail au clergé diocésain. Il s’agit de Fataki, Pimbo et Drodro, avec quelques remplacements dans d’autres paroisses de temps en temps. Marc vivait ces transmissions avec des sentiments mélangés : de la tristesse pour devoir quitter ceux qu’il aimait tant et de la joie pour la mission accomplie. En 1985 il doit se faire soigner pour des problèmes à la gorge, heureusement moins graves que ce que l’on avait craint. Sa dernière nomination à Drodro ne l’avait pas enthousiasmé, mais il écrivit au provincial de la Belgique : “Je suis convaincu qu’ici à Drodro également je serai un missionnaire heureux… Dieu est mon bouclier!”
Après Drodro Marc est envoyé à Badiya parce que les Pères Blancs ont transmis toute la région lendu au clergé local. Le problème : la langue n’est plus le kilendu mais le swahili. Rude épreuve à son âge, mais le résultat était positif. En 1994 il participe à Rome à la session “transition au troisième âge ”. En avril 1995 maman Deneckere meurt à l’âge de 92 ans. Lors de l’invasion de Kabila-père, qui est aidé par les Rwandais pour renverser Mobutu, Marc est une fois de plus évacué via Kampala en décembre 1996. Il assura alors pendant plusieurs mois l’économat du projet “ Blauwe Torre ” à Varsenare et participe aux activités du Centre. Il apprend à connaître plusieurs paroisses et va souvent donner son témoignage dans des cercles missionnaires. En octobre 1998 le voilà de retour à Bunia, où il assure l’accueil à la maison régionale et se charge de l’économat de la région. A l’occasion il donne un coup de main à la paroisse. La misère en ville est grande et son coeur ne résiste pas aux nombreux pauvres qui viennent frapper à la porte… Jusqu’au jour où, en février 2003, il est expulsé du pays par le chef des rebelles, Thomas Lubanga, qui à ce moment tenait le sceptre à Bunia. Marc raconte : “Pourquoi m’a-t-on mis à la porte ? J’avais juste un peu trop démontré qu’en tant que missionnaire je ne faisais aucune distinction entre les ethnies quand il s’agissait d’aider les gens. J’avais effectivement procuré des gîtes en lieu sûr à des familles lendu en fuite, dont les habitations avaient été brûlées par des hema (opposés aux lendu). Pour ce chef des milices hema, c’était un acte de trahison. Je devais donc partir”. Dans le “procès verbal de reculement” nous lisons les chefs d’accusation suivants: “Il s’est compromis dans les activités clandestines à caractère subversif notamment : 1. Hébergement clandestin des déplacés avec l’intention d’éclabousser le Mouvement en ce qui concerne la sécurité des personnes et la libre circulation dans le Territoire sous contrôle de l’U.P.C./R.P. (Union des Patriotes Congolais pour la réconciliation et la paix, la principale milice hema de Thomas Lubanga ; 2. Etre en intelligence avec les forces négatives qui entravent le processus de Pacification et Réconciliation. De tout ce précède, avons déclaré le susnommé PERSONA NON GRATA sur toute l’étendue que contrôle l’U.P.C./R.P.” Le père Jean Mottoul reçut la même lettre quelques jours plus tard. L’intervention directe et courageuse du père Jan Mol, régional, n’y changea rien. La radio et la télévision s’en prirent aux Pères Blancs et à Marc en particulier. Son frère Jo fut à son tour faussement accusé. Il était manifeste que les missionnaires étaient des témoins gênants des multiples injustices. On préférait les envoyer voir ailleurs. Des centaines de Pères Blancs ont travaillé en Ituri. Et c’est justement Marc, peut-être le plus aimé par les petites gens parmi tous ces Pères Blancs, qui devait prendre congé de cette façon ? “Heureux les doux !”…
En Belgique, une fois remis de ses émotions, Marc est pendant quelques mois économe dans notre communauté de Bruges. En octobre 2004, l’on fait appel à lui pour l’important économat de la Keizerstraat à Anvers. Toujours prêt à aider et à trouver une bonne solution pour les problèmes d’un chacun, il est soutenu et apprécié aussi bien par les confrères que par le personnel. En 2009 il fête en l’église Sainte-Elisabeth à Courtrai son jubilé d’or, entouré d’une foule de membres de sa famille et de connaissances. A cette occasion il écrivit dans le journal paroissial ‘Kerk&Leven’: “Comme missionnaire j’ai été envoyé par le Christ et par l’Eglise pour apporter aux hommes un message de paix, de réconciliation et de joie. Au bout de 50 ans de vie sacerdotale et missionnaire, j’ai la joie de témoigner devant vous que je suis un missionnaire reconnaissant et heureux. Reconnaissant au Seigneur pour ma vocation. Reconnaissant à ma famille et à mes concitoyens pour leur sympathie et leur soutien. Reconnaissant à la population du diocèse de Bunia, parce qu’ils m’ont donné la possibilité d’annoncer et de vivre au milieu d’eux l’amour de Dieu pour nous. Et tout cela fait de moi un homme profondément heureux”. En 2013 Marc prend vraiment sa retraite et rejoint la communauté de Varsenare, où de plus en plus une paix et un contentement profonds émanent de lui. Il s’est éteint doucement, le soir du 10 août, assis dans son fauteuil devant sa télévision…
Les règlements concernant corona ne tolèrent point d’exception. Une dizaine de membres de sa famille et quelques confrères de la communauté de son frère Jo pourront assister aux obsèques le vendredi 14, à 10h30 à Varsenare. La famille prévoit d’organiser plus tard une commémoration à Courtrai.
Jef Vleugels
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