BIENHEUREUX CHARLES DECKERS – EL KALIMA
Homélie de Mons Luc Terlinden, archevêque de Malines-Bruxelles, prononcée le 15 décembre 2024, au cours de la célébration de l’Eucharistie en l’église Notre Dame de la Cambre à Ixelles en mémoire du centième anniversaire de naissance du Bienheureux Charles Deckers, M.Afr., et du 30e anniversaire de sa mort à Tizi Ouzou en Algérie. Cette homélie est suivie ci-dessous d’un message de remerciements par Gilles Deckers.
« Certains esprits chagrins pourraient critiquer la prédication de Jean le Baptiste. Ne se montre-t-il pas trop indulgent en ne condamnant pas les collecteurs d’impôts au service de l’occupant romain, mais en leur recommandant simplement de ne rien exiger au-delà du montant fixé ? Et que dire des soldats, à qui il ne demande pas de renoncer à leur métier, mais de ne faire violence à personne ?
Jean ne demande pas à certains de tout quitter pour le suivre, comme le fera Jésus. Et dans sa réponse à la question des foules « Que devons-nous faire ? », il n’impose pas des sacrifices pour les péchés ou de l’imiter dans sa vie ascétique et austère. Il les appelle à assister ceux qui sont dans le besoin, à être honnête et équitable dans l’exercice de leur métier. Somme toute, ce sont là des exigences qui s’imposent à tous, Juifs et non-Juifs. C’est une éthique universelle.
Reprocher toutefois à Jean le Baptiste de ne pas aller assez loin dans ses exigences par rapport à celles de Jésus est non seulement une forme d’anachronisme – Jean n’est pas le Messie mais le précurseur – mais ce n’est pas reconnaître non plus son rôle dans l’annonce de la Bonne Nouvelle. Car lui aussi participe à l’annonce au peuple la Bonne Nouvelle dit l’évangéliste Luc.
C’est ici un aspect important de la mission et de l’annonce de l’Évangile. Nous ne pouvons pas penser que la mission consiste nécessairement en une annonce immédiate et explicite de l’Évangile. Les missionnaires en terre d’Algérie en ont fait l’expérience. L’annonce de la Bonne Nouvelle passe d’abord par la fraternité, la solidarité avec un peuple, le dialogue et la charité. Elle ne se fait pas par prosélytisme.
Charles de Foucauld écrivait ainsi à propos de la mission auprès de Touaregs : « Il faudrait de bons prêtres, en assez grand nombre, non pour prêcher : on les recevrait comme on recevrait dans les villages bretons des Turcs venant prêcher Mahomet, (…) ; mais, pour prendre le contact, se faire aimer, inspirer estime, confiance, amitié ».
Les missionnaires sont d’abord des experts en humanité, comme le fut Père Charles, le Belge cette fois, ou plutôt l’Algérien, car il s’était fait tellement le frère des populations au milieu desquelles il vivait qu’il avait pris leur nationalité. Et sa maîtrise de la langue avait fait de lui « un Berbère avec les Berbères ».
La mission s’appuie d’abord sur cette grande charité à laquelle nous invite Jean le Baptiste : « Celui qui a deux vêtements, qu’il partage avec celui qui n’en a pas ; et celui qui a de quoi manger, qu’il fasse de même ! » Jésus ne dira rien d’autre en parlant du jugement dernier : « J’étais nu, vous m’avez habillé ; j’avais faim, vous m’avez donné à manger ».
La mission respecte aussi les rythmes et les états de chacun. Elle ne demande pas au collecteur d’impôt de vivre du jour au lendemain pauvre comme un franciscain, ou au soldat de déposer les armes sur le champ. « Ne faites violence à personne, n’accusez personne à tort ; et contentez-vous de votre solde » demande plutôt Jean le Baptiste à ces soldats. Si nous vivions déjà cela, combien de souffrance et de génocides ne seraient pas évités !
A la base de la mission, il y a une humanité partagée. Et la première conversion est d’abord celle de la charité et de la fraternité. Une conversion universelle, qui s’adresse à tous. Au nom de cette fraternité, la mission n’est donc pas prosélytisme mais se vit dans le grand respect des consciences, de cette liberté intérieure. Le père Philippe Thiriez écrit à propos du Père Charles que, dans toute son œuvre, refusant tout prosélytisme, « il voulait que tous, jeunes ou adultes, restent libres de cœur dans leur foi, leur unité intérieure. »
Nous pensons parfois un peu vite que l’annonce de l’Évangile consiste avant tout à proclamer explicitement le Christ et à catéchiser. Sans renier cet aspect de la mission, nos frères et sœurs missionnaires d’aujourd’hui, au nom même de leur foi en Jésus, nous invite d’abord à vivre en frères et sœurs universels.
Comme Jean le Baptiste, il faut pouvoir s’effacer devant celui qui est plus grand et plus fort, le Christ, mais aussi devant le sanctuaire de Dieu en chaque personne humaine : sa conscience et sa liberté de cœur, en l’accueillant comme un frère, une sœur.
La fraternité est le socle de l’annonce de l’Évangile. Père Charles a ainsi été témoin du Christ par sa grande humanité et son amour désintéressé. Il s’est fait frère parmi ses frères et sœurs. Répondre à l’appel de Jean le Baptiste aujourd’hui et préparer les chemins à la venue du Seigneur commence par cela : vivre la fraternité et une charité concrète. »
Broederlijkheid is het fundament van de verkondiging van het Evangelie. Pater Charles was zo getuige van Christus door zijn grote menselijkheid en zijn onbaatzuchtige liefde. Hij werd een broeder onder zijn broeders en zusters. Vandaag ingaan op de oproep van Johannes de Doper en de weg bereiden voor de komst van de Heer begint hier: broederlijkheid beleven en concrete naastenliefde in praktijk brengen.
+ Luc Terlinden, Archevêque de Malines-Bruxelles
REMERCIEMENTS.
En tant que Co Président d’El Kalima, je voudrais vous remercier chaleureusement de votre présence à la messe de commémoration de mon oncle Charles Deckers, Fondateur de l’Association El Kalima en 1978.
El Kalima signifie la Parole. L’association El Kalima est fort active dans le dialogue inter-religieux et elle a pour but de jeter des ponts entre les religions, les spiritualités et toute personne de bonne volonté.
El Kalima œuvre à ce but en développant les activités suivantes, mentionnées sur notre site web et dans notre dépliant :
• des ateliers d’objets religieux en milieu scolaire (nous avons touché plus de 1000 élèves l’année passée)
• des formations à la demande des professeurs de religion et des PO afin d’améliorer leurs connaissances de la religion musulmane pour améliorer le vivre ensemble
• des partenariats avec des lieux de culte, des associations, des événements interreligieux
• des rencontres interreligieuses et des activités thématiques, par rapport aux thèmes de la santé, des couples mixtes, de la recherche de sens en milieu carcéral
• des publications annuelles comme le calendrier interreligieux et publications ponctuelles de dossiers pédagogiques.
Nous voudrions proposer à l’Archevêché un partenariat qui se construira en développant des évènements en commun pour le dialogue inter-religieux dans le diocèse.
Une magnifique biographie de Charles Deckers, écrite par Salah Selloum, ancien élève de Charles Deckers en Algérie est disponible au prix de vente de 35 €. Les bénéfices iront à l’Association El Kalima.