Philippe Docq, M.Afr.Il y a peu de temps, je venais de mettre en ligne sur le site YouTube un montage vidéo réalisé par un confrère quand la plate-forme m’informa que la vidéo contenait du matériel audio protégé par les droits d’auteur et que, par conséquent, elle serait augmentée de publicité pour payer les droits dans la plupart des pays et serait carrément censurée dans d’autres pays où la loi est plus sévère. J’étais très impressionné par la performance technique des ordinateurs qui avaient détecté la musique illégalement utilisée dans ce montage. Et, en même temps, j’étais fâché, frustré comme peut l’être un ado pris en faute alors qu’il était si sûr de lui…

Il est vrai que lorsqu’on met en ligne une vidéo sur YouTube, on sort du cercle strictement privé et l’on expose au monde entier une œuvre que l’on est fier de proclamer « nôtre » … alors que nous utilisons amplement du matériel qui ne nous appartient pas, la bande-son par exemple, et parfois même des photos, voir des clips vidéo. Dans le monde académique – les étudiants d’aujourd’hui ne le savent que trop bien – cela s’appelle du « plagia » qui est très sévèrement puni et souvent sans appel… Ce que l’on reproche à l’étudiant est la prétention d’une maîtrise qu’il n’a sans doute pas. Si le vaste monde de l’internet et un bon logiciel de traitement de texte permettent à l’étudiant de produire un travail académique bluffant, il permet aussi à tout un chacun de devenir plus ou moins facilement un artiste en compilant des œuvres ou des morceaux d’œuvre qui ne sont pas les siennes. Nous avons sans doute tous fait cela alors que nous préparions une lettre circulaire de nouvelles ou un feuillet liturgique. Aujourd’hui les blogs ou les réseaux sociaux que nous entretenons méritent bien une photo ou l’autre qui puisse illustrer ou même clarifier notre état d’esprit du moment… sauf que c’est probablement tout-à-fait illégal, à moins qu’il ne s’agisse de la vôtre ! Internet est une technologie qui expose tout, offre tout, met tout à disposition, alors que ce contenu « virtuel » est le fruit d’un savoir, d’un savoir-faire, d’une expertise de personnes qui souvent en dépendent pour vivre ou même survivre. Lorsque j’étais enfant, mes parents me disaient de ne jamais prendre ce qui appartenait à autrui. Mais aujourd’hui que la propriété est virtuelle, nous pensons souvent qu’elle est à disposition de tous, qu’elle peut être acquise sans faire de mal à personne puisqu’elle peut se démultiplier à l’infini. Et pour protéger le contenu artistique et ses auteurs, la loi balbutie, car le défi est grand mais relativement nouveau ! En France, et dans la plupart des pays occidentaux, des lois existent qui veulent protéger la propriété intellectuelle. Ainsi, en France par exemple, utiliser pour votre blog une image téléchargée sauvagement sur Internet pourrait vous coûter jusqu’à 300.000 euros et deux ans d’emprisonnement. « Dura Lex, sed Lex !» (La Loi est dure mais c’est la Loi). Que dire alors des nombreux morceaux de musique et des nombreux films vidéo que nous échangeons allègrement au travers de nos clés USB ? Volerions-nous un CD dans un magasin de musique, ou un DVD dans un centre de location de films ? Non, bien sûr ! Mais nous le faisons allègrement dans le secret de nos chambres à travers une connexion internet anonyme. Et qui sommes-nous pour juger de la qualité immorale des maisons d’édition pour justifier notre cupidité à tout posséder sans rien dépenser ?

Si les États cherchent des solutions juridiques, les artistes et les maisons d’édition proposent des solutions commerciales. De nombreux sites internet proposent le téléchargement d’images contre payement, offrant des licences plus ou moins faciles à comprendre, et d’autres proposent des forfaits pour une écoute illimitée d’un vaste répertoire de musique ou le visionnage de vidéos en « streaming ». Mais encore faut-il avoir un accès décent à l’internet, bien sûr !
Lorsque j’étais étudiant-stagiaire en Tanzanie, il y a déjà bien longtemps, le grand sport parmi les élèves de l’école primaire était d’avoir entre les doigts, au bon moment, le crayon qui permettrait d’éviter la punition de ceux qui ne pouvaient même pas produire le travail de classe, faute de l’outil de base. Aujourd’hui, l’outil de base est l’ordinateur. « O tempora, o mores ! » Et si le crayon était inaccessible à bon nombre d’enfants du village où je faisais mon stage, les logiciels qui permettent aujourd’hui à nos ordinateurs de produire un travail efficace et de vraiment nous aider sont souvent inaccessibles à notre « style de vie pauvre ». Une licence décente de Windows 10 coûte entre €130 et €250 ; une licence pour Office Professionnel vous coûtera quant à elle €450. Je ne parle même pas des logiciels très pointus d’assistance à l’exégèse par exemple, ou à la manipulation graphique des photos ou des vidéos. Ces logiciels sont chers car ils sont très performants, bien sûr, mais aussi parce qu’ils sont commerciaux. Ils sont supposés payer leurs concepteurs et leurs producteurs. Nous pourrions sans doute être excusés si nous n’avions d’autre alternative…
Mais les alternatives sérieuses existent ! Le système d’exploitation « Windows » auquel vous êtes habitué pourra être agréablement remplacé par un système d’exploitation « Linux » qui ne vous coûtera pas un sou et vous procurera même plus de sécurité que son rival avide de votre argent… La suite « Microsoft Office » pourra être remplacée très efficacement par la suite « LibreOffice » et le logiciel de manipulation « The Gimp » n’aura rien à envier à son cousin « Photoshop ». Il y aurait beaucoup plus à dire sur la différence entre ces deux plate-formes, trois si on y rajoute le système d’exploitation de la « Marque à la Pomme », et sur la différence entre logiciels propriétaires et logiciels libres… mais cela fera l’objet d’un autre article, car la place qui m’est accordée est limitée.
Lorsque nous prêchons le dimanche matin, nous proclamons que la vérité nous rendra libres. Et nous aimons y croire. Sortir de l’obscurité et être transparents dans les moyens que nous employons pour communiquer et pour nous divertir nous rendront davantage libres et surtout crédibles aux yeux de nos chrétiens et spécialement devant les jeunes qui nous observent et comprennent ce que nous faisons.
« A Dieu la gloire, éternellement »
Philippe Docq, M.Afr.