Si tu veux la paix, sois familier des conflits

 Dans les relations humaines, les conflits semblent inévitables. Ils sont omniprésents et font partie de la vie quotidienne. Nous sommes dans une société où tentation de conflit et désir de paix sont étroitement liés. Étant donné que le conflit est naturel et qu’une vie sans conflit n’existe presque pas, il est important, voire essentiel, pour l’homme de prendre conscience de l’existence du conflit dans la vie quotidienne. Tout ce qui touche les relations humaines peut être source du conflit. Ce peut être au sein d’une famille, d’une communauté, ou entre deux individus. Le conflit est donc normal, en ce sens que l’homme est un être de relation. Il peut détruire, comme il peut construire l’unité des personnes ou d’une communauté humaine. Voilà pourquoi il est très important d’étudier tous les paramètres du conflit en vue d’aboutir à un consensus qui soit bénéfique à tous.

Le conflit comme facteur déstabilisateur

Qui dit conflit fait référence aux disputes, à la colère, à l’affrontement, au désaccord, à la violence, à la tension, à l’absence d’harmonie, à la confrontation, à la crise, etc. Considérant tous ces dérivés, on peut affirmer que cet élément déstabisateur vient troubler la quiétude d’un homme, d’un peuple, d’une communauté, d’une nation. Mal géré, il a un impact dévastateur pouvant affecter le tissu social, les relations interpersonnelles ou la personne humaine elle-même. L’un des aspects négatifs le plus évident est la destruction qui engendre des expériences douloureuses. Il peut surtout être source de démotivation et avoir des effets néfastes quand un climat de suspicion et de méfiance règne.

Le conflit comme facteur constructif

Bien que les conflits soient souvent associés à des conséquences néfastes, comme il a été mentionné ci-dessus, certains observateurs soutiennent qu’ils peuvent également être une source de bienfaits. Le conflit peut être un lieu de socialisation où on apprend à vivre ensemble en reconnaissant que l’autre est différent de soi. Aussi favorise-t-il la remise en question personnelle et mutuelle. Il devient ainsi source du développement personnel. Il peut être une opportunité pour mieux vivre ensemble et restaurer l’harmonie et la cohésion. Au Niger, en janvier 2015, nous avons été témoins d’une situation de conflit que nous avons vécue dans la foi et l’espoir d’un lendemain meilleur. Il s’agit de l’attaque anti-chrétienne dont l’Église-famille du Niger a été victime. Révoltés contre une publication faite par Charlie Hebdo caricaturant le prophète Mohamed, certains musulmans ont décidé de se venger en brûlant des églises, hôtels et débits de boissons. C’est ainsi que nous avons assisté, impuissants, à la destruction d’une quarantaine d’églises, toutes pillées et parties en flamme. Cette expérience vécue nous a permis de renouveler notre amitié et notre fraternité à l’ensemble de la communauté musulmane du Niger. Même si nos églises ont été brûlées, notre foi est restée intacte et renouvelée. Nous sommes restés fermes et unis dans la prière pour que l’amour soit plus fort que la haine et la violence.  

Quelques facteurs déclencheurs du conflit

Les sources de conflit sont variées et complexes. Les différences culturelles et politiques, la religion, l’idéologie, les inégalités socio-économiques et le style de communication peuvent jouer un rôle significatif dans l’escalade des conflits. En effet, la divergence du contexte culturel fait que l’interprétation d’une attitude, d’un comportement, d’un geste, etc. n’a pas forcément la même connotation d’une communauté à l’autre, d’un individu à un autre. Une compréhension approfondie de ces dynamiques est essentielle pour la prévention et la résolution des conflits.

Engagement de l’Église dans la résolution pacifique des conflits

Dans le cas du Niger, le message des évêques résume le rôle et la place de l’Église dans la résolution pacifique des conflits : « Nous, les Évêques de l’Église catholique, en communion profonde avec nos communautés durement éprouvées par les événements inattendus et tragiques que nous avons subis sans en comprendre les raisons, nous venons renouveler notre amitié et notre fraternité à l’ensemble de la communauté musulmane de notre pays… Notre cœur n’a jamais cessé d’être animé par des paroles fortes de Jésus : « aimez vos ennemis, faites du bien à ceux qui vous haïssent, souhaitez du bien à ceux qui vous maudissent, priez pour ceux qui vous calomnient » (Lc 6, 27-28) » .

L’Église joue un rôle primordial dans la médiation, la réconciliation et la promotion de la paix. Ses leaders ont souvent servi de médiateurs neutres dans les conflits, facilitant le dialogue entre les parties en conflit. Leur autorité morale et leur capacité à transcender les divisions politiques et sociales, ont pour la plupart du temps contribué à créer un espace sûr pour la négociation. Il est du devoir de ces leaders de le rappeler aux fidèles et de les inviter à suivre l’exemple de Jésus en pardonnant aux autres, même lorsque cela semble difficile ou impossible. Cela implique le renoncement à la colère, à la rancune et à la vengeance. Ils n’oublieront surtout pas de les inviter à la vigilance et à la responsabilité pour ne jamais céder à la pression des influences externes peuvant fragiliser les relations et le vivre ensemble pacifique.

Que faire en tant que témoin de l’évangile pour la prévention et la résolution des conflits ?

Dans sa lutte contre l’esclavagisme, notre fondateur le cardinal Charles Lavigerie disait : « Je suis homme, l’injustice envers d’autres hommes révolte mon cœur. Je suis homme, l’oppression indigne ma nature … ». En tant que Missionnaires d’Afrique et témoins de l’évangile, nous ne devons pas rester indifférents aux conflits, ni les fuir. Nous devons développer les initiatives visant à préserver la cohabitation pacifique, le respect réciproque de nos convictions et la convivialité qui ont toujours caractérisé notre société. Il nous revient de nous engager dans le dialogue pour comprendre davantage que nos diversités religieuses et ethniques sont des richesses qui doivent contribuer à la consolidation de notre unité car « ce qui nous rassemble est plus fort que ce qui nous divise ».

Par: Innocent Habimana, M.Afr.

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