Le monde de l’injustice sociale peut être mieux décrit avec un scénario dans lequel un homme qui meurt de soif est confortablement assis sur un puits rempli d’eau pure, mais qui est délibérément empêché par une super force de boire cette eau. Il s’agit d’un traitement barbare imprégné de haine, de méchanceté, d’égoïsme et de manque de respect et de considération envers l’autre.
Le monde est injuste
Les inégalités qui existent dans ce monde nous poussent parfois à nous poser la question de savoir si certaines personnes sont nées pour souffrir (Réf. Lucky Duby) et d’autres naissent avec des cuillères en argent dans la bouche. C’est le refrain de nombreux habitants de Kisenso, une des communes de Kinshasa qui manque de certaines nécessités de base comme l’eau potable, de bonnes routes, l’électricité, des opportunités d’emploi, des hôpitaux bien équipés, etc. Pour les personnes qui traversent ces épreuves, leur refrain perpétuel est que le monde n’est pas juste parce qu’ils ne sont pas traités équitablement et que leurs besoins fondamentaux sont bafoués. Bon nombre de ces personnes traversent parfois ces épreuves en raison de qui elles sont, c’est-à-dire en raison de leur couleur, de leur religion, de leur race, de leur tribu, de leur pays et de leur sexe. Ces difficultés ne sont pas imposées par Dieu mais par leurs semblables.
C’est pourquoi ce refrain « le monde est injuste » peut être expliqué à partir de différentes perspectives de vie, de pratiques culturelles et religieuses, de certaines institutions sociales et politiques établies et du statut économique des gens. Expliquons cela plus en détail.
Pratiques culturelles et religieuses
Concernant certaines pratiques culturelles et religieuses, comme les rites de veuvage. Ces rites sont des cérémonies célébrées dans certaines cultures lorsqu’une femme perd son mari. Le but de cette pratique est de rompre ce qu’ils appellent la relation spirituelle qui pourrait exister entre le mari décédé et l’épouse survivante. Malheureusement, ces pratiques déshumanisent la veuve, lui refusent certains droits fondamentaux et ne respectent pas sa vie privée. Pour les veuves déshumanisées, le monde est injuste car un veuf ne bénéficie pas du même traitement. N’a-t-il pas également besoin d’être purifié de toutes sortes de relations spirituelles avec l’épouse décédée ?
Imaginez la torture psychologique d’une veuve empêchée de prendre un bain pendant plusieurs semaines, condamnée à porter les mêmes vêtements, interdite de quitter sa chambre, obligée de dormir par terre et de manger dans des assiettes cassées. Dans le cas de Kisenso, certains sont même chassés de la maison du mari décédé et tous les biens de ce mari sont confisqués. La paroisse Saint Etienne qui se trouve à Kisenso vient en aide à un bon nombre de ces veuves qui sont rejetées par leur belle-famille et leurs propres enfants parce qu’elle est considérée comme une sorcière, donc l’assassin de son mari. Beaucoup d’entre eux n’ont d’autre choix que de vivre sous un soleil brûlant et de s’exposer à des pluies torrentielles qui précipitent souvent leur mort immature.
Institutions sociales et politiques
Parmi les institutions sociales et politiques établies, certaines créent une injustice sociale. C’est le cas lorsque certains groupes de personnes se considèrent comme un groupe aristocratique, empêchant ainsi d’autres personnes de gravir l’échelle sociale. Tous les efforts qui ont été faits pour changer cette situation n’ont pas porté leurs fruits, car le système établi dans cette société donnée exclut certaines tribus du pouvoir. Parfois, la situation devient pire lorsque certains jeunes hommes et femmes se voient refuser le droit de se marier en raison de malentendus tribaux. Dans nos activités pastorales ici, nous avons rencontré un certain nombre de cas où des jeunes filles et des jeunes gens ont dû rompre leur relation.
L’injustice sociale se produit dans une situation où le développement s’effectue en fonction de la localisation d’un territoire donné. Une réflexion approfondie sur les raisons pour lesquelles certaines parties d’un pays continuent de se développer, tandis que d’autres sont négligées, nous fait comprendre que les villes d’un pays sont créées en fonction de leur emplacement (là où se trouve une population dense).
Dans certains pays, les zones faiblement peuplées bénéficient de moins de projets de développement. Les habitants de ces régions sont parfois traités comme s’ils avaient choisi d’être là où ils se trouvent. Ils sont livrés à eux-mêmes pendant que leurs homologues ont tout à leur disposition et utilisent parfois de manière égoïste ce qui appartient en fait à tout le monde. Les inégalités en matière de qualité de l’éducation, de santé, de réseau routier et de certains équipements sociaux sont largement déterminées par la localisation de chaque village ou territoire. Le développement des capitales de chaque pays ne peut être comparé à celui des villages de ce même pays. Certains continuent de faire la fête et de jeter de la nourriture tandis que d’autres sont même privés de manger ce qui est jeté.
Nul n’a besoin d’un doctorat pour comprendre ces disparités de développement, notamment à Kisenso (Kinshasa) où le développement est tiède à tous les niveaux. Il n’est pas rare de voir des gens faire la queue et passer la nuit autour des sites de forages pour acheter de l’eau dès qu’elle commence à couler. Cela empêche parfois les enfants d’aller à l’école, paralyse nos activités pastorales et affaiblit la participation des fidèles à l’Église. aux activités comme des messes, des répétitions, des retraites, des récollections, etc., car ils doivent chercher de l’eau. La population survit grâce à l’eau des puits et des forages, car il n’y a pas d’autre source d’eau. La paroisse Saint-Etienne est l’une des entités qui fournissent à la population une eau potable de bonne qualité, même si elle est toujours limitée en raison de la forte demande et de l’offre limitée. Quand Kisenso sera-t-il connecté à la Regideso ? C’est une question quotidienne à laquelle manque une réponse. Pourquoi les égaux sont-ils traités de manière inégale ?
Il y a toujours une grande joie lorsque chaque personne est traitée équitablement et que sa dignité est respectée. L’élimination de l’individualisme, de l’égoïsme, de l’avidité, de la corruption, etc. conduira à établir la justice sociale parmi les créatures de Dieu.
Par: Paschal Bapuoh, M.Afr.