Communiqué du Chapitre – 21 mai 2022

Communiqué du Chapitre - 21 mai 2022

Vers la fin de la première semaine, l’étape de l’écoute mutuelle continue par l’intermédiaire des différents rapports. Aujourd’hui, ce fut le tour de la PAC et de la Maison Généralice.

PAC
Emmanuel Ngona

Mission et la promotion de projets générateurs de revenus.

Après une brève description de la province, de ses secteurs et communautés, du nombre croissant des missionnaires d’Afrique congolais, le père Ngona a partagé les objectifs missionnaires de la province, pour ensuite expliquer la réalisation de l’autofinancement de la PAC par des projets générateurs de fonds.

Les projets générateurs de fonds ne sont pas seulement l’idée des missionnaires d’Afrique, mais aussi celle de la SECAM. Ces projets demeurent en ligne avec notre charisme et mission, ils doivent aussi répondre à des besoins réels de la population. L’engagement de la PAC a été illustré principalement par deux grands projets, Le Georges Defour à la Ruzizi et celui de CML à Kigali. Ces deux projets ont nécessité un bon investissement. Ils offrent divers services : chapelle, salle polyvalente, boutiques, lieux de rencontre, bureaux, espace pour les hôtes, restaurant, etc. Leur succès ne fait que croître et les revenus augmentent. D’autres projets d’envergure ont été réalisés comme à Kisenso (Kinshasa) avec un projet d’eau pour la paroisse et la population et à la nouvelle maison de Kigali. Trois écoles ont été construites dans la province. Ces projets ont besoin d’une bonne gérance.

Des projets de moindre envergure ont été réalisés, au niveau local, avec des petites boutiques, ou encore projets agricoles, etc. Il y eut une session pour les curés, les initiant à l’importance et l’élaboration de tels projets. N’oublions pas qu’il s’agit de mission et pas d’argent simplement.

MAISON GÉNÉRALICE
Martin Grenier et Odon Kipili

Portail de l’Église d’Afrique à Rome.

La maison généralice est bien connue par beaucoup de confrères pour être la résidence du conseil général et l’équipe qui le soutient, et des confrères étudiants. De nombreuses sessions y sont tenues pour nos confrères et SMNDA et elle est déjà un lieu de rencontre pour beaucoup d’africains de Rome. Sa rénovation a fait surgir la préoccupation d’améliorer son rayonnement à Rome et dans le monde missionnaire.

Avec le temps, plusieurs suggestions ont été exprimées, et parmi elles, l’idée que la maison généralice devienne le portail de l’Église d’Afrique est née. La collecte et diffusion des nouvelles d’Afrique et de son Église, la planification de conférences avec des thèmes pertinents pour l’Afrique, tenue de sessions traitant sur des réalités africaines, conférences de presse, usage de la salle du chapitre, possibilité d’un petit musée. Le projet correspond à notre charisme missionnaire. Le Président du SECAM, le Card. Philippe Ouedraogo le supporte. Le projet permettrait à la maison généralice de rejoindre les périphéries africaines et d’en informer le public. Il y a bien sûr de nombreux détails à prévoir, de personnes à contacter et des confrères à nommer pour élaborer ce projet et le mettre en marche.

ASSEMBLÉE PLÉNIÈRE

Les six équipes ont apporté le fruit de leurs échanges à la première assemblée plénière du chapitre. On leur avait demandé de partager trois thèmes essentiels provenant des différents rapports entendus jusqu’à aujourd’hui. Le but de cet exercice consiste à enregistrer les principales lignes directrices émergentes, par exemple dialogue interreligieux, mission hors Afrique, internationalité, interculturalité, finances. Il n’y a pas lieu de paniquer si vous ne voyez pas vos préférences car le chapitre en est à sa première semaine.

Communiqué du Chapitre – 20 mai 2022

Communiqué du Chapitre - 20 mai 2022

Les capitulants s’habituent à la salle du chapitre, usage des microphones, ainsi qu’à l’horaire. La présentation des différentes provinces suit son cours.

Pour le chapitre, on a demandé à ce que les provinces soient décrites en tenant compte d’un aspect particulier de la mission et de notre société, en exprimant les forces, faiblesses, les défis et les menaces. Cette manière de procédé permet d’avoir à l’esprit toute la société dans son ensemble et élargir le champ de discussion dès le début des échanges.

PROVINCE DE L’AFRIQUE DE L’OUEST
Luc Kola

La province de l’Afrique de l’Ouest nous a offert une description de
la mission dans un contexte d’insécurité et de violence.

De nouvelles réalités émergent : violence, exode rural, déplacement des populations, extrémisme religieux, services déficients d’éducation et de santé. Les gens vivent dans la peur.

Les confrères se rappellent du courage des premiers missionnaires qui ont été tués en traversant le Sahara. De plus, ils reçoivent de la vaillance en considérant notre vocation, charisme, notre esprit de corps. La prière demeure une source de fidélité et de courage. L’apostolat continue avec diverses activités, comme inculturation et l’IFIC et le projet Sénoufo. Dans le contexte de l’insécurité, le dialogue interreligieux et Justice et Paix prennent un rôle central ainsi que la pastorale des réfugiés. Comme les déplacements dans nos postes sont de plus en plus difficiles en raison du covid et de l’insécurité, les médias ont joué un rôle important pour conserver le contact avec les gens et aussi pour l’évangélisation.

La situation d’insécurité sur laquelle nous n’avons pas de contrôle a des répercussions chez les confrères tant au niveau personnel que communautaire. La mission étant plus dangereuse, plusieurs confrères vivent des préoccupations, peur et tension. Les accompagner et les soutenir comportent des difficultés et demandent compétences et ressources. Parfois certains hésitent avant d’accepter des nominations à la province et à l’intérieur de la province. On suggère que les maisons de formation préparent le mieux possible les jeunes à la mission dans un tel contexte.

Malgré tout cela, notre appel à la mission demeure et les missionnaires y sont engagés. Le Seigneur nous a promis qu’il serait avec nous jusqu’à la fin.

PROVINCE DE L’AFRIQUE DE L’EST
Aloysius Ssekamatte

Mission dans le contexte de l’inculturalité.

La présentation a débuté en mentionnant plusieurs engagements de la province, les réfugiés au Sud Soudan et en Ouganda, les maisons de formation sur son territoire, l’animation missionnaire et vocationnelle et les progrès de la nouvelle maison provinciale à Nairobi. Le dialogue islamo-chrétien reste une priorité et nous recevons des demandes d’engagement dans ce domaine.

La vie communautaire est considérée comme un témoignage évangélique. Nos communautés se transforment avec le changement des cultures africaines qui sont différentes les unes des autres et de la culture locale de leur mission. Ces différences peuvent devenir un atout pour le témoignage apostolique.

Nos communautés internationales et interculturelles génèrent certaines difficultés. D’abord, les gouvernements nous posent des limites pour les visas. Nous constatons qu’il n’est pas rare de trouver dans un même poste de mission des confrères de la même nationalité. Nous remarquons aussi des conflits interpersonnels et une instabilité communautaire qui influencent l’engagement à long terme, le contact auprès des gens et l’apprentissage de la langue. Les circonstances font qu’un confrère peut se retrouver avec trop de responsabilité, comme curé, économe, etc. La compréhension des conseils évangéliques a besoin de renouvellement. L’obéissance devient parfois pénible. L’individualisme, le sentiment d’avoir des droits acquis, les intérêts personnels détruisent la cohésion communautaire. Plusieurs confrères éprouvent des problèmes de santé tôt après l’ordination.

PROVINCE D’AFRIQUE AUSTRALE
Felix Phiri

Mission dans le contexte de l’internationalité
spécialement pour la gouvernance et la nomination de provinciaux.

Il y a dans la société une préoccupation quant à la nomination des supérieurs majeurs et provinciaux tout particulièrement. Il semble y avoir une volonté à ce que le provincial soit de la nationalité de l’un des pays de la province. Est-ce la manière de procédé chez les missionnaires d’Afrique?

Un regard sur notre passé nous montre que le grand groupe national était autrefois français. Peu à peu, l’évolution a conduit la société à une internationalité selon les vues de notre fondateur et la vie internationale a été promue tant au niveau de nos communautés que des supérieurs majeurs. Présentement nous vivons aussi un moment de transition avec des éléments fondamentaux :

    • Le sentiment d’appartenance à notre pays d’origine. Comment devons-nous le vivre?
    • Autrefois : le système de provinces en Europe et Amérique qui envoyaient du personnel et des ressources et qui offraient que des communautés largement d’une seule nationalité. Les régions recevaient les missionnaires qui vivaient en communautés internationales.
    • Maintenant : nous n’avons que des provinces et toutes les provinces envoient et reçoivent du personnel et des ressources. Ainsi les provinces actuellement accueillent des missionnaires nommés à la province pour l’apostolat missionnaire, des missionnaires en congé ou malades, d’autres « nationaux » nommés pour un travail en province.
    • Ainsi le jeu des nationalités s’en trouve bien transformé. Les nationaux vivant dans leur province d’origine ainsi que ceux vivant dans les autres circonscriptions désirent s’exprimer quant à la consultation et nomination des supérieurs majeurs.
    • Nous devons garder notre caractère international et interculturel. Là se trouve le bien de notre société et de la mission. Le nationalisme mal compris ne devrait pas intervenir dans les nominations.

PROVINCE D’EUROPE
Gérard Chabanon

La province de l’Europe nous décrit sa Mission hors Afrique.

Cette mission comprend six centre principaux, Roquetas, Liverpool, Marseille, Toulouse, Berlin et Karlsruhe qui sont des lieux pour vivre notre charisme missionnaire dans des domaines où nous répondons de façons variées à un besoin réel. Ces projets sont orientés dans la ligne du Pape François, la fraternité et la solidarité. Leurs activités se ressemblent et il est impossible de les décrire toutes ici.

Il y a un volet pastoral : pastorale traditionnelle auprès des populations catholiques parmi les immigrants.

Il y a le volet dialogue, avec les musulmans et les chrétiens de diverses Églises, spécialement dans le dialogue dans la vie courante, comprenant la collaboration avec les autres groupes religieux et les différentes autorités civiles. Notre présence a un impact très positif.

Il y a aussi un volet social : s’approcher des migrants africains, des familles, aller dans les quartiers populaires, visiter les prisonniers, former différentes associations et groupes de support pour les femmes, étudiants dont certains sont maintenant des étudiants africains de l’Ukraine (Allemagne), engagement contre le trafic des personnes, aide aux drogués.

Beaucoup de ces activités ne marcheraient pas sans l’aide et la compétence des laïcs.

Ces projets nous mettent en contact avec les Églises locales et les autorités civiles. Les missionnaires d’Afrique s’y engagent et les développent avec la préoccupation de transmettre l’esprit missionnaire à nos collaborateurs et aux personnes que nous rencontrons.

L’idée d’un synode méditerranéen est en train de surgir.

PROVINCE  DES AMERIQUES
Réal Doucet

La province des Amériques nous montre
une autre image de la mission hors Afrique.

Elle compte maintenant trois secteurs, États-Unis, Mexique et Canada. Le Brésil sera fermé lorsque les procédures administratives seront terminées. Il y a une reprise de candidats au Mexique avec des jeunes à la maison de formation. Les confrères les plus actifs aux États-Unis ne sont pas américains. Le Centre Afrika, dont la mission consistait de favoriser l’intégration des africains dans la société montréalaise, est fermé pour le moment en raison du Covid.

Le Père Barthélemy Bazemo nous a décrit le AFJN, les activités de Justice et Paix, le travail de plaidoyer auprès des autorités de la Maison Blanche pour soutenir l’Afrique. Le AFJN se veut un lieu d’accueil et de rencontre pour de nombreuses personnalités africaines. Plusieurs évêques africains recourent à ses services. Il y a des fruits positifs pour le développement et la paix en l’Afrique. « Avec Washington, nous sommes présents là où ça compte ».

L’AMS présente de bonnes possibilités aux missionnaires d’Afrique, dans le domaine de l’animation missionnaire et vocationnelle, la formation, les finances. Des contacts avec les jeunes aussi sont possibles. Il y a de l’avenir pour la société.

SECTION D’ASIE
Paul Johnston

La Soa constitue une entité missionnaire hors Afrique.

En Asie, nous sommes présents dans deux pays, Inde et Philippines et nous espérons pouvoir entrer au Vietnam. L’animation missionnaire / vocationnelle et la formation tiennent une place importante. Il y a un ralentissement présentement pour l’animation en raison du confinement qui a empêché les animateurs de visiter les candidats possibles.

Les missionnaires d’Afrique sont présents dans les quartiers populaires et priorisent le contact auprès des jeunes. Ils vont beaucoup aux périphéries. Ils sont engagés aussi auprès des migrants. Le dialogue interreligieux fait aussi partie des activités, vivant dans un milieu avec un faible pourcentage de chrétiens. Les contacts avec des congrégations religieuses sont bons.

SOA contribue à l’internationalité et l’interculturalité de la société des missionnaires d’Afrique.

Certains évêques indiens pensent que notre animation vocationnelle diminue les vocations diocésaines. L’obtention de visas indiens est devenue difficile. Depuis quelque temps, beaucoup s’interrogent sur la liberté religieuse en Inde.

Aldo Giannasi R.I.P.

Société des Missionnaires d'Afrique

Le Père Gaetano Cazzola, Délégué Provincial du secteur d’Italie,
vous fait part du retour au Seigneur du Père

Aldo Giannasi

le jeudi 19 mai 2022 à Modena (Italie)
à l’âge de 86 ans dont 65 ans de vie missionnaire
au Mali, en Algérie et en Italie.

Prions pour lui et pour ceux qui lui étaient chers.

Téléchargez ici le faire-part de décès du Père Aldo Giannasi

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Communiqué du Chapitre – 19 mai 2022

Communiqué du Chapitre - 19 mai 2022

La présentation des rapports constitue la première partie du chapitre. Ainsi aujourd’hui, nous avons entendu quatre de ces rapports : économat général, les provinces du Maghreb, Éthiopie-Proche Orient et Ghana Nigeria. Je vous propose certains points saillants de ceux-ci.

ÉCONOMAT GÉNÉRAL

John Itaru

Le père Itaru nous a partagé quelques chiffres bien sûr. Cependant il a voulu nous présenter les grandes tendances, difficultés et défis de l’état financier de notre société missionnaire. Il est bon de rappeler que nous parlons des finances de toute notre société missionnaire.

Parmi les tendances, il a souligné que les dépenses ordinaires dépassent depuis quelques années les recettes ordinaires. Ce fait demande que l’économe général aille puiser des ressources dans les investissements. Cette coutume n’est pas saine à long terme. La budgétisation aide à limiter les dépenses. De plus, la proportion des dépenses ordinaires diminue par rapport aux dépenses extraordinaires. Nous voyons la création de bons projets d’autofinancement dans certains paroisses et provinces.  Les pensions des confrères âgés diminuent.

Certaines propositions sont parfois exprimées et il est difficile de les mettre en pratique. Par exemple, les investissements en Afrique nous attirent mais il est nécessaire de nous rappeler que les économies africaines sont fragiles. De plus il y a de la violence et des guerres qui viennent perturber les services financiers. Il devient de plus en plus difficile d’effectuer des transferts d’argent d’un pays à l’autre, en Afrique en particulier.

De fait, nous n’avons pas simplement écouter des chiffres à en plus finir, mais bien des perceptions de certaines de nos mentalités et comportements qui peuvent miner nos ressources financières, et qui exigent des conversions communautaires et personnelles.

Beaucoup prennent pour acquis nos états financiers, oubliant combien les finances peuvent se fragiliser rapidement.

Certains ont des attentes irraisonnables, d’autres croient avoir des droits acquis. Nous sommes donc invités à examiner notre pratique de style de vie simple et à mettre la main à la pâte pour générer des recettes et mieux gérer les dépenses.

Les sessions de formation d’économes provinciaux et de secteurs portent du fruit. Il est recommandé d’aborder le sujet de nos finances dans les maisons de formation.  

L’état financier de notre société est stable. Il n’y a pas lieu de paniquer mais de demeurer alertes et prudents pour mieux le gérer et servir l’Afrique et utiliser nos ressources et patrimoine à longue échéance.

ÉTHIOPIE ET PROCHE-ORIENT

Bonaventure Bwanakweri

L’œcuménisme, la formation, Sainte Anne sont au centre de notre mission, à Jérusalem et en l’Éthiopie. EPO est la seule de nos provinces avec la présence forte du christianisme, de l’islam et judaïsme. Il est important de créer des ponts entre les gens.  Les confrères se consacrent beaucoup à la population à travers des centres sociaux qui deviennent de lieux de contact et de service. Parmi les difficultés nous rencontrons la réalité de la guerre, soit en sourdine soit en attente ou en fait. Les langues sont difficiles à maitriser pour nous. Les chrétiens y sont en minorité. Il y a un besoin de raviver notre esprit missionnaire, car certains confrères ne semblent pas beaucoup convaincus de la nécessité de l’œcuménisme.

GHANA / NIGERIA

John Aserbire

La mission au Ghana-Nigeria est centrée sur la première évangélisation. La présence de syncrétisme et des Églises « mushroom » et « à succès » complique notre approche de la population, même si celle-ci fait habituellement confiance aux prêtres et leaders catholiques. Beaucoup laissent l’Église catholique pour se joindre à ces mouvements religieux. Il serait sage de nous demander si notre approche ne serait pas défectueuse, vu le nombre de personnes qui laissent l’Église catholique. Une bonne catéchèse est une de nos priorités. Les succursales catholiques sont parfois très petites et manquent de ressources. Un effort est nécessaire pour mieux avancer dans le domaine de l’inculturation et aussi pour la mise en marche de projets d’autofinancement.

Les langues africaines sont difficiles à apprendre. De plus, l’islamisme crée des tensions et violence dans ces deux pays et ne facilite pas notre contact régulier avec les gens.

MAGHREB

Anselme Tarpaga

Nous avons eu le privilège d’un tour guidé de nos origines en Algérie, lieu de notre fondation, avec notre fondateur, la mention de Missionnaires d’Afrique qui ont laissé leur marque dans le domaine du dialogue islamo-chrétien, les martyrs de l’Algérie, le jubilé de 150 ans de fondation. Le dialogue tient la place primordiale dans l’apostolat de nos confrères au Maghreb. L’incarnation de Jésus constitue la base de ce dialogue car Jésus s’est incarné pour toute l’humanité, établissant ainsi des liens permanents entre Dieu et l’humanité toute entière.

Ce dialogue se vit surtout dans le domaine de la vie quotidienne des gens qui nous accueillent, dialogue social, centres d’études, collaboration pour un projet de développement. Le dialogue théologique ne reçoit pas beaucoup d’emphase. Un mot qui pourrait résumer l’apostolat au Maghreb : présence, passer du temps avec les gens, ce qui est différent de l’inactivité.

Pour durer dans la mission de la présence et dialogue, il est nécessaire que le missionnaire ait une bonne dose de sainteté, d’humilité et de résilience pour surmonter les obstacles et demeurer fidèle à la mission. Parmi les difficultés, nous retrouvons un manque de stabilité dans nos communautés. De plus certains confrères préfèrent être nommés ailleurs qu’au Maghreb. Nos confrères doivent parfois surmonter et relativiser des comportements racistes envers eux.

La diversité des origines des missionnaires d’Afrique au Maghreb est plus marquée qu’autrefois.

Communiqué du Chapitre – 18 mai 2022

Chapter Communication - 18 May 2022

Le travail du chapitre débute aujourd’hui. Lundi, six équipes de travail ont été constituées pour la bonne marche du chapitre, trois françaises et trois anglaises. Ces équipes se réuniront régulièrement tout au long du chapitre. La méthode Voir-Juger-Agir a été adoptée lundi.

Voir : lire, écouter, partager. Il s’agit de prendre le pouls de la société, de la mission et d’en arriver à une vue d’ensemble. Cette tâche s’effectue avec les différents rapports et les partages.

Juger : filtrer les informations et discerner les grandes orientations.

Agir : l’application et l’implémentation des décisions et orientations, avec l’engagement des assemblées post-capitulaires.

Le premier rapport à être présenté est celui du supérieur général. Dans sa démarche, le supérieur général porte l’attention plus sur les six années écoulées que sur des projections sur les six années à venir.  Il n’a pas lu le rapport. Il a simplement fourni une grille de lecture et de travail.

Le conseil général des SMNDA a adressé un mot au chapitre, décrivant brièvement les orientations principales au cours de son mandat et la collaboration entre nos deux instituts, sans oublier le souhait pour le prochain conseil général, provenant de plusieurs membres des SMNDA. Nos sœurs ont aussi participé l’eucharistie.

Dans l’après-midi, l’intervention du supérieur général a porté principalement sur quatre points :

1/- Six années uniques pour notre Société missionnaire :

Des événements significatifs ont eu lieu au cours de ces six années. Il y eut la célébration du 150ième de notre fondation, la béatification de quatre de nos confrères martyrs en Algérie, l’audience avec le Pape François, le conseil plénier à Kampala, notre engagement dans la préparation de la rencontre d’Abu Dhabi, le cardinalat de notre confrère Michael Fitzgerald. Tous ces événements nous encouragent dans notre engagement missionnaire. De plus ils nous permettent de nous connecter plus intensément à nos origines missionnaires et y percevoir la bienveillance de Dieu à notre égard.

Le conseil général a initié de nouveaux projets pour les réfugiés au Sud Soudan et en Ouganda, ainsi qu’engagé la Société dans quelques paroisses en Europe et en Amérique du Nord pour un apostolat auprès de la population africaine.  Nous avons vécu une rencontre internet (en direct) avec les trois confrères qui sont engagés dans le projet du Sud Soudan et avons constaté leur bonheur alors qu’ils partageaient les défis auxquels ils s’affrontent.

2/- Orientations du chapitre 2016 :

Le conseil général a encouragé le ministère de Justice et Paix, Rencontre et Respect de la Création. Il a fait de son mieux pour nommer des confrères au Maghreb. Des projets pour les réfugiés et les migrants ont été commencés en Afrique et hors Afrique. Des efforts ont été faits pour soutenir l’IFIC de Bamako, le Pisai. Le covid a accéléré notre usage de la technologie et des médias, permettant de nombreuses rencontres en ligne.

Le conseil général regrette qu’il n’a pas été possible de fonder une communauté à Addis Abeba.

3/- Défis : 

Le pape François nous inspire un nouvel élan missionnaire. Il le fait constamment avec d’importantes priorités :

  • L’Église en sortie, c’est-à-dire en mission, qui sort de ses zones de confort. L’Église existe pour la mission.
  • L’intégrité de la création et le soin à notre maison commune. Écologie, changement climatique.
  • L’Église qui se réforme en profondeur avec transparence, interculturalité, le respect des différences et la synodalité, le dialogue.

4/- Vers l’avenir, et notre chapitre 2022 :

Comment garder allumée notre flamme du jubilé et demeurer des missionnaires et des témoins prophètiques? Avec quelles conséquences pour notre vie communautaire, notre style de vie, nos finances, la formation des candidats? Dans la synthèse des consultations pour le chapitre, les thèmes de l’interculturalité, dialogue reviennent constamment tant au niveau de la vie communautaire, apostolat missionnaire que de gouvernance.

Les équipes ont poursuivi la réflexion.

Communiqué du Chapitre – 17 mai 2022

Communiqué du Chapitre - 17 mai 2022

Une journée de récollection en silence complet, animée par Dave Sullivan, est prévue pour aujourd’hui. Deux conférences sont au programme.

ARRÊTE, REGARDE ET ÉCOUTE :

Avec des textes de l’évangile de Marc, 4(3,9,23); 4(14-20); 10(30-37); et Luc 16(19-31); 7 (36-50), le père Sullivan a insisté sur la nécessité d’arrêter, de regarder et d’écouter, comme attitude missionnaire et spirituelle pour percevoir le message du Seigneur sur notre monde et sur notre mission. Il ne nous est pas facile de mettre en pratique cette attitude qui est crucial pour notre chapitre 2022.

Des interférences, comme des bruits intérieurs, nos propres idées, des conflits communautaires et interpersonnels, des conflits de pouvoir, nous empêchent d’entendre et de bien comprendre. Il nous arrive de considérer les opinions des autres comme contraires aux nôtres au lieu de les considérer comme complémentaires. Les paraboles utilisées dans la conférence montrent clairement que nous pouvons voir les personnes, sans nécessairement percevoir leurs besoins, leurs situations, ni passer à l’action à cause d’une multitude de raisons.

La chapitre est capital pour le futur de notre société missionnaire et aussi pour nos engagements missionnaires. Puisse le Seigneur guider ses membres dans leur écoute, leur vision, leur perception et évaluation en vue de prendre des décisions sages et courageuses pour la gloire de Dieu, pour le bien du peuple de Dieu qui nous est confié et aussi pour notre fidélité à la mission.

SUR LA ROUTE ENSEMBLE EN SUIVANT JESUS ET NOS RÊVES

Martin Luther King a prononcé un discours célèbre : “J’ai eu un rêve…” quand tous les hommes se tiendront dans la fraternité… Avec ces mots, il a inspiré des millions de personnes. Les Missionnaires d’Afrique ont aussi un rêve qui vient de Jésus et du Cardinal Lavigerie, un rêve d’annoncer la Bonne Nouvelle au monde africain, de fraternité, de solidarité, de fraternité, de respect, de collaboration et d’un monde juste, un monde plus pacifique.

En ce début de Chapitre, il est essentiel de nous souvenir de notre rêve, de notre vocation, de notre charisme et de nous y reconnecter en tant qu’apôtres du Christ. Nous sommes invités à le faire ensemble, individuellement et communautairement. Dans 2 Tim. 1(6-7), Paul demande à Timothée de renouveler le don de Dieu en lui. Cette parole de Paul est pour nous aujourd’hui. Nous ne devons pas tomber dans le piège d’oublier notre zèle initial Apoc. 2(4-5).

Le bon Samaritain, Luc 10(30-37) ; la guérison de l’aveugle, Marc 10(46-52).
Le Père Sullivan a utilisé quelques images pour nous faire voir et marcher. Lavigerie était comme le Samaritain voyant les besoins (de l’homme blessé) et nous comme les hôteliers engagés aux soins de la mission, collaboration à long terme. Il a également utilisé la guérison de l’aveugle pour nous rappeler que Jésus a guéri l’aveugle assis au bord de la route, lui donnant la vision et la possibilité de marcher sur la route, à la suite de Jésus. Voilà ce que Jésus fait avec nous aussi.

Puissions-nous marcher ensemble dans un “esprit de corps”, dans l’unité et la solidarité en poursuivant le même rêve, en faisant tout notre possible pour garder une vision globale de la Société. Nous sommes appelés à témoigner du rêve de Dieu par nos vies, comme témoins prophétiques du monde africain d’aujourd’hui. Demandons au Seigneur de nous accorder le courage et la sagesse nécessaires pour répondre aux défis actuels.

Nous sommes réunis en son nom et il est avec nous comme promis pour nous accompagner sur notre chemin missionnaire Mt. 18(20).

Communiqué du Chapitre – 16 mai 2022

Communiqué du Chapitre - 16 mai 2022

La journée d’aujourd’hui marque l’ouverture officielle du chapitre 2022. Il est assez difficile de donner des nouvelles car les capitulants délibèrent à huis-clos. À partir des annonces, nous pouvons toutefois en dire quelques mots très brefs. Les premiers travaux du chapitre sont consacrés à l’appel des capitulants, à l’informations et approbation des différentes procédures du chapitre lui-même, à la méthode qui sera utilisée, à l’acceptation des collaborateurs comme les représentants de différents ministères, comme Justice et Paix, intégrité du ministère, économat, traducteurs, secrétaires, etc. Les capitulants sont au nombre de quarante alors que les autres participants sont une quinzaine.

Le soir, le cardinal Michael Fitzgerald a présidé l’eucharistie à laquelle tous les membres du chapitre et tous les membres de la communauté de la maison généralice ont assisté. Dans son introduction, le Père Stan Lubungo a partagé qu’il a vu dans la nomination dans la nomination de Mike Fitzgerald comme cardinal comme un signe de bienveillance de Dieu envers notre société. Il a demandé d’accompagner le chapitre dans nos prières.

Le Cardinal Fitzgerald nous a lui aussi invités à remercier le Seigneur pour toute l’histoire de notre société missionnaire. Il a dit que les liens entre Charles de Foucauld et nous étaient significatifs, tout en mentionnant une différence importante. Tandis que Charles de Foucauld insistait sur l’importance de suivre et imiter « Jésus à Nazareth », nous, en revanche, nous suivons et imitons « Jésus de Nazareth », proclamant la Bonne Nouvelle, guérissant les malades et formant ses disciples. Dans son homélie, il a ressorti le côté positif de la Loi, qui ne se limite pas qu’aux commandements et a pour but de mener à la vie, la « loi » devenant l’expression de notre disposition intérieure pour vivre l’évangile et le charisme missionnaire au jour le jour avec simplicité.

 

Nous sommes motivés par la charité, disait le Cardinal Fitzgerald, pour annoncer la Bonne Nouvelle. Mais comment le faire dans le monde d’aujourd’hui? Voici la question que les membres du chapitre sont appelés à répondre. Il nous a guidés pour demander que l’Esprit Saint assiste les membres du chapitre à répondre à cette question et comprendre davantage le message de Jésus.

Demain le père Dave Sullivan animera la récollection des membres du chapitre. Cette information constitue pour nous tous une autre bonne invitation à prier pour le chapitre.

Marien van den Eijnden, R.I.P.

Société des Missionnaires d'Afrique

Le Père Jozef de Bekker, Délégué Provincial du secteur des Pays-Bas,
vous fait part du retour au Seigneur du Père

Marien van den Eijnden

le lundi 16 mai 2022 à Heythuysen (Pays-Bas)
à l’âge de 82 ans dont 57 ans de vie missionnaire
en Tanzanie et aux Pays-Bas.

Prions pour lui et pour ceux qui lui étaient chers.

Téléchargez ici le faire-part de décès du Père Marien van den Eijnden

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Communiqué du Chapitre – 14 mai 2022

Communiqué du Chapitre - 14 mai 2022

Enfin, le jour du 29ième Chapitre des Missionnaires d’Afrique est arrivé, et il a été rendu possible grâce à toutes les contributions qui sont parvenues à Rome et dont les membres du chapitre vous remercient. Depuis quelques jours, la maison généralice est imprégnée de la fièvre du chapitre qui prenait de l’ampleur à mesure que les capitulants arrivaient de beaucoup de pays où les Missionnaires d’Afrique sont présents. Ainsi il y eut un temps des retrouvailles pour certains qui ne s’étaient revus depuis des années et pour d’autres la chance de faire de nouvelles connaissances.

Cette fois, le chapitre des Missionnaires d’Afrique coïncide avec deux événements marquants pour notre société missionnaire, l’anniversaire des martyrs de l’Algérie, et la canonisation de Charles de Foucauld. Ces deux événements sont ainsi célébrés par la communauté de la maison généralice et aussi et par les membres du chapitre. Ainsi nous avons reçu un exposé sur les martyrs de l’Algérie par Mgr. John MacWilliam et un vidéo sur l’Algérie offrant une description de la situation algérienne à cette époque. Il y a aussi un panel sur Charles de Foucauld par trois de nos confrères, Card. Michael Fitzgerard, Mgr Claude Rault et Mgr. John MacWilliam. Dimanche, plusieurs des capitulants et membres de la communauté participeront à la célébration de la canonisation de Charles de Foucauld au Vatican. 

Aujourd’hui, les membres du chapitre se sont rencontrés en assemblée pour la première fois. Il s’agissait de traiter des questions pratiques d’horaire de la maison et d’introduction à la technologie nécessaire pour assurer que le chapitre soit « sans papier », usage de téléphone, tablette et ordinateur. L’occasion est bonne pour amorcer la dynamique entre les capitulants et pour débuter le cheminement capitulaire.

Cette communication ne serait pas complète sans mentionner l’aménagement de la salle du chapitre. Un équipement technologique y a été installé pour l’usage des ordinateurs, etc. Les membres du chapitre ont été introduits aux microphones, écouteurs, écran, etc. Ces exercices permettront un lancement plus harmonieux du chapitre proprement dit dès lundi.

Nouvelle salle du Chapitre

Et pour terminer, ce soir, samedi, un BBQ est prévu pour favoriser les contacts entre capitulants et membres de la communauté de la maison généralice, histoire de nous connaitre davantage.

Nous comptons sur vos prières pour la présence et l’œuvre de l’Esprit Saint tout au long du chapitre. Puisse le Seigneur ouvrir les cœurs à son amour, les oreilles à son message, et l’esprit pour accueillir sa sagesse.

Jean Lamonde
14 mai 2022

Charles de Foucauld

CULTURE ET INCARNATION CHEZ CHARLES DE FOUCAULD

« Il vint à Nazareth, le lieu de la vie cachée, de la vie ordinaire…  »(CdF)

Nous arrivons à une dimension non négligeable de la vocation du Frère Charles, celui de la Culture. Cette dimension a été présente dans plusieurs périodes de sa vie, mais avec des visées différentes, au gré de ce qu’il vivait à ces étapes de son existence.

  Il est intéressant de suivre une ligne à travers laquelle nous pouvons lire comme un fil rouge : la cohérence du projet de Dieu dans sa vie tout en maintenant l’importance de la liberté humaine. Mon projet ici est de voir au fil de sa vie comment a évolué cette dimension, qui est devenue pour lui un moyen de s’incarner dans un peuple et de rejoindre Jésus à Nazareth.

Ne perdons pas ce fil conducteur. C’est pour cette raison qu’il faut faire un lien entre cet homme cultivé et son travail ardu sur la culture et sa façon de vivre sa vocation de « Nazareth ». Il ne perd nullement de vue la recherche de sa « chère dernière place » ! A défaut de pouvoir l’atteindre, il continuera à mettre ses pas dans ceux de Jésus en essayant de mieux faire corps avec son Bien Aimé Frère et Seigneur Jésus.

 

1-L’expérience du Frère Charles.

C’est à travers son existence, son expérience, que nous poursuivons cette façon d’appréhender le message que le Frère Charles nous laisse sur cette dimension de sa vocation.

Ce que l’on oublie parfois, c’est qu’il  avait une bonne formation scientifique, et une grande culture, sous des apparences de paresse et d’indolence lors de sa jeunesse. Il est important de ne pas le figer dans l’image d’un homme à genoux au pied du Saint Sacrement, toujours en adoration.

S’il a donné beaucoup de temps de sa vie à la prière, notamment dans la période où il était en recherche de vocation, puis dans sa période monastique, puis lors de son séjour à Nazareth. Arrivé à Beni Abbès il a consacré beaucoup de travail et de temps à la pratique de la langue arabe et ensuite à  Tamanrasset, à l’apprentissage de la langue touarègue. Il l’a fait dans l’esprit de Nazareth, qui était à la fois une expérience de prière, d’enfouissement et de relation.    

Une recherche antérieure à sa conversion. : Une passion d’explorateur.

Essayons de comprendre cette soif d’apprendre à  partir de l’expérience antérieure à sa conversion. Tout enfant, il ne brillait pas particulièrement dans les études. On peut le qualifier d’élève ordinaire. En primaire il était déjà bien noté en dessin : cela lui servira plus tard ! En secondaire, il aimait lire avec son ami Gabriel Tourdes, et des lectures à la fois puisées dans les auteurs anciens, et dans les auteurs modernes, comme pour nourrir sa non-foi en Dieu, voire même la justifier…

 Il a dû apprendre un peu de cartographie durant sa formation à St Cyr et l’école de cavalerie de Saumur. Il aimait faire de cheval… et était un bon cavalier. Ce qui ne l’empêchera pas de sortir le dernier de sa promotion d’officiers de cavalerie !

Que va-t-il donc se passer, quel va être l’élément déclencheur de son goût d’apprendre, de perfectionner son savoir ? D’où va venir ce désir de s’approprier la langue de l’autre, de s’immerger dans sa culture, de devenir homme parmi les hommes, jusqu’à essayer de se fondre dans leur milieu ? Nous sommes arrivés après sa démission de l’armée, en fin janvier 1882. Il a 24 ans.

 C’est l’époque des grands explorateurs, des grandes conquêtes coloniales. Il a été pris par le goût de l’aventure lors de l’expédition contre Bouamama, résistant algérien. Il a pris goût à une vie simple et spartiate.

Que va-t-il faire pour satisfaire ce goût de l’aventure ? La carte du Maroc est marquée par un grand blanc, et c’est une région encore inconnue de la France. Le désir de l’explorer le prend, par goût du défi, de faire ce que d’autres n’ont pas fait. Peut-être de se prouver à lui-même qu’il peut réussir, et aussi redorer le blason des de Foucauld qu’il a bien terni par sa conduite ?

 Il se prépare donc pour son grand voyage au Maroc. Il prend 15 mois de  travail minutieux pour apprendre l’arabe et l’hébreu, le yiddish.

Cela nous permet de mesurer déjà tout l’investissement qu’il met dans cette exploration. Tout indolent et paresseux qu’il était, il a appris pendant sa période de préparation militaire à faire des relevés géographiques, des cartes, à dessiner… Il dispose déjà  d’un bagage pour se lancer dans l’aventure. Cela lui servira dans son expédition.

 J’y vois les premiers pas d’une plongée dans un milieu. Bien sûr ce n’est pas pour des motifs religieux, il le fait par goût d’aventure et de célébrité. Mais Dieu se sert de tout pour le préparer à sa vocation future !

 Il veut aller là où aucun européen n’est allé, comme il voudra vivre là où aucun  prêtre n’a vécu. Cela tient du désir ici de réaliser un exploit tout humain, mais il a déjà en lui ce qu’il faut pour plus tard entrer dans l’âme d’un peuple et s’y incarner. Il y a là des pierres d’attente. Il ne partira pas de rien. Cela fait partie de la dimension « culturelle » de son existence, même si ce souci en soi ne l’effleure pas. Cela  prendra plus tard une autre forme, celle de « Nazareth ». Nazareth prendra alors une teinte toute nouvelle, celle de devenir comme Jésus, de s’incarner dans un peuple par amour pour ce peuple et par amour de son Seigneur.

 De juin 83 à mai 84, il entreprend cette exploration déguisé en rabbin juif avec comme compagnon Mardochée, un connaisseur du terrain, qui lui servira de guide. Il va donc explorer le sud marocain, faire des relevés cartographiques, entreprendre des relations avec ce peuple, côtoyer de près aussi bien des juifs que des arabes, mener aussi une vie semée de danger. Il va même risquer d’y perdre sa vie, et être sauvé grâce à des marocains.

Bref, il réussit et revient à Alger. Il devient célèbre. A Paris, en mai 1885, il reçoit la médaille d’or de la Société Française de Géographie. Il a 27 ans. Il devient célèbre. De mai 85 à janvier 86, il va faire un autre voyage l’année suivante dans le sud algérien et le sud tunisien.

En février, il s’installe à Paris et prépare son ouvrage « Reconnaissance au Maroc », il loue un appartement, dort sur un tapis enveloppé d’un burnous… Il garde une vie simple. Son livre sera publié en 1888. Il se convertit la même année, en octobre.

Si j’ai mis en avant cet investissement dans une autre culture », ce désir d’entrer dans la connaissance de la langue et des coutumes d’un peuple, c’est  parce qu’il mettra à profit cet acquis pour réaliser  plus tard cette dimension d’incarnation par l’enfouissement dans un peuple, mais pour d’autres raisons : celle  de vivre à la façon de Jésus de Nazareth. Nous y arrivons.

 Nazareth : une école qui passe par l’étude de la langue et de la culture.

 Faisons un grand pas. Dès sa conversion – à 30 ans – Charles a voué sa vie à Dieu et opté pour la vie religieuse. Il a longuement cherché la façon dont il pourrait la concrétiser : pèlerinage à Nazareth, visite dans plusieurs monastères, et finalement options pour le monastère de Notre Dame des Neiges où il va rester peu longtemps. Finalement, il va partir à Akbès en Syrie, pour les raisons que nous avons déjà mentionnées, – c’est un monastère pauvre et éloigné de sa famille. Il va y séjourner six longues années. Retour à Nazareth où il désire y vivre dans l’humilité comme Jésus. Et enfin, décision, toujours en accord avec l’abbé Huvelin de recevoir le Sacerdoce pour rejoindre les plus lointains et y vivre son idéal de Nazareth. Nous sommes en 1901.

A Beni Abbès, il connaît la langue arabe, et va transcrire dans cette langue des passages d’Évangile, et aussi constituer un semblant de catéchisme à l’intention d’éventuels catéchumènes. Les Musulmans demeurent imperméables à cet effort d’évangélisation. Il n’insistera pas,  et restera au milieu d’eux dans le respect de leurs coutumes et de leur religion. Il se fait construire un petit monastère pour accueillir éventuellement des Frères… qui ne viendront jamais !

 Nous le rejoignons sur le chemin qui va le conduire de Béni Abbès à Tamanrasset. Il connaît déjà très bien l’arabe. En 1903, sur proposition de son ami Laperrine, il envisage de quitter Béni Abbès. Vous voyez que son désir de stabilité est bien loin, et. Il ne peut en effet se rendre de nouveau au Maroc, ce qu’il rêvait. Il s’en ouvre à Mgr Guérin et à l’abbé Huvelin. Et en janvier 1904, il commence une tournée d’apprivoisement qui va être longue et le mener dans un certain nombre d’oasis sahariennes. Son projet est bien d’évangéliser les Touaregs. Là est bien encore son souci premier. Durant ses longues marches, il apprend les premiers rudiments de tamashek (langue des Touaregs). Et il entreprend déjà une traduction approximative de l’Evangile dans cette langue.

 En 1905, il obtient l’autorisation de Mgr Guérin et de l’Abbé Huvelin de participer à une tournée de nomadisation vers le Hoggar. Sa passion d’explorateur ne l’a pas quittée. Il rencontre en juin de cette année Moussa Ag Amastane, l’amenokal de la tribu des Ahaggar. En aout, il arrive à Tamanrasset et commence par vivre dans une hutte de roseaux. Puis il va se construire une petite maison en pierres et terre, la première du village. C’est le signe de son premier enracinement. Même si son projet est de refaire des incursions à Béni Abbès, il fait au moins preuve d’un désir de stabilité.

Il n’a rien perdu de son âme d’explorateur… et reprend quelques voyages, mais en 1907, il revient au Hoggar et son installation à Tamanrasset prend de plus en plus forme. Je passe sur ses allées et venues, ses absences de Tamanrasset, ses 3 voyages en France, mais c’est bien là qu’il va y élire résidence. Il s’est mis avec ardeur à la langue tamashek.

 En 1908, il termine – déjà- en grande partie la transcription et la traduction de six mille vers touaregs. Il en terminera la copie définitive peu avant sa mort. Ce sont des poésies qui n’ont rien de mystique. Elles exaltent les prouesses des guerriers, les beaux yeux de la belle aux yeux noirs qui attend son amant au retour de la bataille, la beauté du pays, la belle allure de sa chamelle, que sais-je encore. Peu ont une consonance religieuse. C’est dire l’importance qu’il attache à ce que vivent les gens de cette région, à travers la découverte et l’expression de leur langue.

 Il s’est déjà mis à l’œuvre pour d’abord  la composition d’un petit lexique pour fournir aux militaires et aux futurs missionnaires un instrument pour pouvoir aborder le pays et sa population.  Ce travail va prendre ensuite la forme d’un « Dictionnaire touareg », pour valoriser cette langue extrêmement riche, à partir de poésies touarègues et de textes en prose recueillis auprès de a population. C’est un travail immense qui va investir ses dernières années. Il y travaille parfois plus de 10 heures par jour ! Il va le terminer peu de jours avant sa mort tragique. En fait, il avait commencé sans trop de méthode. Un linguiste, Motylinski, va passer quelques jours avec lui et lui donner une ligne méthodologique qui va lui permettre de mener à bien cet énorme ouvrage de 4 volumes qui aujourd’hui encore fait autorité. Le 1er décembre 2016, a eu lieu à l’université de Tamanrasset un séminaire sur son dictionnaire.

 Mais il regrette souvent de ne pouvoir terminer cette entreprise qui l’empêche de s’adonner au travail manuel :

« Le lexique me demande un temps qui dépasse mes prévisions. Je n’aurai pas fini avant trois ou quatre ans : cela fera bien douze ans employés à cela. C’est beaucoup ! » (À Mme de Bondy en 1912)

Et le 1er décembre 1916, jour de sa mort, il écrit à Raymond de Blic : 

« J’ai fort avancé, mais non achevé, mes petits travaux de langue touarègue ».

En fait, son dictionnaire sera achevé quelques jours avant sa mort.

 Le désir contrarié de travailler de ses mains… comme Jésus à Nazareth.

            Ce qu’il désire surtout, pour rester dans cette ligne d’incarnation, c’est suivre Jésus dans l’intimité de Nazareth. Il fait tout pour travailler de ses mains dans la ligne de cette imitation. Il déplore souvent que ses travaux linguistiques ne lui laissent que peu de temps pour cet humble travail.

 Le travail intellectuel pour lui-même lui répugne parfois… parce qu’il l’empêche de travailler de ses mains comme le faisait Jésus à Nazareth ! Et l’on sent bien qu’il a fait son travail linguistique plus par devoir que par goût ! Mais il l’a fait dans l’esprit que j’ai essayé de vous communiquer plus haut. Il a conscience de travailler pour les générations à venir. Mais de fait, ce travail est surtout apprécié aujourd’hui des Touaregs eux-mêmes !

Charles de Foucauld a eu toujours l’impression que le temps passé à l’étude de la langue et des coutumes de la population où il vivait était arraché en quelque sorte au travail manuel. Et pourtant il a travaillé d’arrache-pied, avec une ardeur peu commune. Ce qu’il faisait là était un travail d’enfouissement destiné aux générations futures tout en en tirant profit dans les contacts que cela pouvait lui donner.

 Il a eu soif d’être comme Jésus à Nazareth enraciné dans la vie des gens qu’il côtoyait pour pouvoir y rayonner Jésus, même s’il n’en voyait pas les fruits. Il faisait œuvre de défricheur. Sa façon de témoigner n’était pas de le faire par les paroles, et pourtant Dieu sait s’il était capable de le faire, mais de rayonner de la charité de Jésus pour tout être humain. Sa vie voulait rejoindre Jésus de Nazareth.

Charles de Foucauld, en fait, n’était pas un linguiste de vocation. Nous pouvons nous demander qu’est-ce qui pouvait le pousser à tant investir sur la langue touarègue dans ce village d’une vingtaine de familles.

 Ce travail est en ligne direct avec l’esprit de Nazareth et son projet de suivre les pas de Jésus sur ce chemin. Il n’a pas « joué », il n’a pas fait semblant, il n’a pas fait la comédie en vivant cette existence cachée dans ce coin perdu du Hoggar. C’est dans un souci d’incarnation, et  surtout de préparer la voie à d’autres qu’il s’est attelé à cette œuvre immense. Pour se trouver en conformité avec son Maître et Seigneur Jésus, Verbe fait chair. C’est tout le sens de ce profond investissement. Il voulait d’ailleurs que son travail soit publié sous un autre nom que le sien. Toujours ce désir de petitesse et de chercher la dernière place ! Cet effort, ce désir nous rejoint comme Eglise dans notre souci d’incarnation au milieu d’un peuple, c’est pourquoi, il faut attacher tant d’importance à cette dimension de sa vie.

 

2- Notre vie d’Eglise sur les pas de Jésus avec le Fr. Charles.

 Jésus s’est incarné pour aller à la rencontre des hommes et des femmes de son temps.

C’est devant les gens de Nazareth, là où il a grandi, au sein de la synagogue, qu’il a dévoilé le sens de son envoi :

« L’Esprit de Dieu est sur moi… Il m’a envoyé porter la Bonne Nouvelle aux pauvres, annoncer aux captifs la délivrance, et aux aveugles le retour à la vue, rendre la liberté aux opprimés… » (Lc 4,18).

Comme nul n’est prophète en son pays, les habitants de ce village l’ont pratiquement chassé, comme on le fait pour un prétentieux gêneur des habitudes ancestrales. Pour qui se prend donc ce fils de charpentier, sans diplômes universitaires, et qui ose nous faire la leçon ?

Peut-être ce refus a-t-il déclenché sa décision d’aller voir ailleurs, puisque ses proches se sont montrés sourds et fermés à son message.

Mais n’oublions pas que cette démarche vers les siens a été précédée de trente années d’apprentissage dans la grande université de la vie!

Pendant trente ans, il a appris à être homme. Il a grandi comme les enfants de son âge, il est allé s’instruire dans la synagogue de son village; il a aussi appris les choses de la vie, de la mort, de la souffrance des gens de son temps. Il a exercé un métier, s’est sali les mains, a sué pour gagner sa vie.

N’oublions pas que Jésus a vécu au sein d’une grande famille. On se le représente souvent entre Marie et Joseph. C’est d’ailleurs ainsi que Charles de Foucauld l’imagine. Mais il a vécu dans la grande famille de Joseph, à qui Dieu avait dit en songe « Ne crains pas de prendre Marie chez toi, ta femme..(Mt 1,20) ». Et l’on parle de ses « frères et sœurs » pour dire qu’on le connaît bien !

J’aime penser qu’il a découvert en Joseph l’image du père idéal. Il a fallu qu’il en soit ainsi pour qu’il puisse dire un jour : « Quand vous priez, dites « Abba, Père ! ». En aurait-il été ainsi s’il avait eu avec Joseph une relation ratée ?

En méditant sur la vie à Nazareth, pensons à cette belle figure de Joseph. On le présente parfois sous les traits d’un vieillard tranquille. Pour moi, il incarne l’éternelle jeunesse de Dieu à qui est confié le Verbe incarné.

Dans cette université de la vie à Nazareth, il a observé les gens, les a écoutés: rien ne transparaît d’une quelconque activité de prédication pendant cette longue période. Avant de donner, avant de parler, il a longuement appris à recevoir : de ses parents, de ses contemporains, mais aussi et surtout de Dieu son Père, rencontré et découvert dans l’intimité, derrière la porte fermée de sa maison ou sur quelque montagne. A Nazareth, Jésus priait. Il a appris la prière par ses parents et son entourage.

Sa vocation commence par une longue confrontation avec la vie, par un long cœur à cœur avec l’Ecriture, Lui, le Verbe, la Parole de Dieu, Il s’est mis à l’étude. Car il a étudié, en autodidacte, et aussi sans doute sous la férule  de quelques rabbins dans la synagogue de son village.

Avant de parler, de se révéler, il se tait et il écoute, il apprend, réfléchit, prie. Il se fait proche des autres, de leur vie quotidienne, de leurs soucis, de leur questionnement devant l’existence qu’il partage avec eux.

C’est à Nazareth que se prépare, que “fermente” le langage si simple des Paraboles. A travers elles, il nous dira ce que c’est que la croissance du grain, le travail de la vigne, du figuier. Mais aussi le travail des ouvriers. Et c’est de la contemplation des gens ordinaires qu’il fera l’étonnante proclamation des Béatitudes. Sa connaissance de l’Ecriture le prépare à ses affrontements avec les Pharisiens.

Il se prépare à être l’homme des autres, l’homme pour les autres.

Lorsqu’il quitte Nazareth et qu’il commence à cheminer sur les sentiers de Palestine, c’est d’abord pour aller rencontrer les siens et leur annoncer la Bonne Nouvelle: celle de l’amour universel de Dieu. C’est d’abord aux gens de son peuple qu’il s’adresse. C’est vers eux qu’il dirige ses pas.

  « Et le Verbe s’est fait chair, et il a demeuré parmi nous » (Jn 1,14).

En Jésus, le Verbe de Dieu s’est incarné et il a établi sa demeure au sein de notre humanité. Il a voulu apprendre le dur métier de vivre dans une époque et un pays précis, il a parlé la langue et suivi les coutumes d’un peuple. Il est devenu de ce peuple, il a travaillé de ses mains, s’est mêlé à la vie des gens. Nous voulons nous aussi à la façon de notre Maître, participer à la vie de ce peuple où nous vivons. Vous saisissez ce que cela peut exiger pour nous, ses disciples !

 Cela met la culture en lien profond avec l’Incarnation.

C’est d’ailleurs dans ce sens que le Concile a compris la culture :

« Entre le message de salut et la culture, il y a de multiples liens. Car Dieu, en se révélant à son peuple jusqu’à sa pleine manifestation dans son Fils incarné, a parlé selon les types de cultures propres à chaque époque » (Gaudium et Spes. L’Eglise dans le monde de ce temps. N° 58)

L’incarnation par la culture est d’abord un engagement à être présents les uns aux autres et à nous accueillir dans nos différences. En France, (comme je l’ai vécu au Sahara) regardant nos communautés diocésaines, nous sommes issus de nations et d’ethnies différentes, de langues maternelles différentes, de mentalités différentes. Et nous sommes présents dans un monde marqué par la différence. La dimension de culture, surtout dans les périphéries de nos grandes villes est de plus en plus marquée. Sans parler de la culture globale qui tend à effacer les autres !

Dès lors, notre engagement chrétien s’inscrit naturellement dans notre vocation commune : connaissance du langage, des coutumes, des traditions religieuses et culturelles, dans le plus grand respect de ceux avec qui nous vivons. Entrer dans la culture de l’autre, c’est à la façon du Christ, s’incarner là où nous sommes et partager son humanité.

S’incarner, c’est d’abord se mettre à l’école du langage, apprendre à parler pour entrer en relation. Au Maghreb, nous faisons de notre mieux pour donner cette possibilité notamment aux nouveaux arrivants et arrivantes. Nous savons toute l’énergie que Charles de Foucauld a déployée en lien avec sa vocation de vie à Nazareth, combien d’heures de travail acharné, de fatigue. C’est aussi une tâche de l’Eglise de faire cette démarche, pas seulement pour apprendre la langue mais aussi mieux comprendre la culture de l’autre pour mieux y semer le levain de l’Evangile. Cet effort n’est-il pas à faire aussi dans notre monde moderne sur lequel plane tant de peurs et de suspicion ? N’est-ce pas aussi un monde à approcher et à sauver ?

Cette dimension va aussi dans un autre sens, celui du partage culturel: dans un fraternel échange, mettre l’autre en mesure de mieux connaître sa propre culture, son histoire, et aussi l’ouvrir à d’autres cultures. Tout le travail fait dans nos bibliothèques et les cours de langue, sont un élargissement de notre horizon vers l’autre. Ces activités sont aussi des « plateformes de rencontre » pour reprendre une expression de Pierre Claverie, où nous nous ouvrons  à notre humanité plurielle.          Dans une émulation mutuelle, nous montrons qu’il est possible de nous rencontrer sur le terrain de nos différences culturelles : c’est un partage d’humanité, une stimulation commune pour une terre plus humaine. Pour reprendre une expression du Fr. Christian de Chergé : nos différences prennent alors le sens, la direction,  d’une communion.

 +Claude Rault.

Charles de Foucault devant sa première chapelle à Tamanrasset (Hoggar) 1905