Hermann Kimmich, R.I.P.

Société des Missionnaires d'Afrique

Le Père Rudi Pint, Délégué Provincial du secteur d’Allemagne,
vous fait part du retour au Seigneur du Père

Hermann Kimmich

le mercredi 9 décembre 2020 à l’hôpital de Balingen (Allemagne)
à l’âge de 81 ans dont 53 ans de vie missionnaire
au Burkina Faso, en Côte d’Ivoire, en Mauritanie et en Allemagne.

Prions pour lui et pour ceux qui lui étaient chers.

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Homélie du Supérieur général le 8 décembre

Homélie du Supérieur général le 8 décembre

"Sous la protection de Marie Immaculée Reine d'Afrique"

Alors que tous les Missionnaires d’Afrique, ainsi que leurs sœurs, les Sœurs Missionnaires de Notre-Dame d’Afrique, célébraient, à travers le monde, la fête de l’Immaculée Conception de Marie, fête officielle de nos deux instituts, les deux communautés de Rome célébraient autour des deux Supérieures générales et de leur conseil. Voici l’homélie prononcée ce jour-là par le Père Stan Lubungo.

Le 8 décembre, nous célébrons la fête de l’Immaculée Conception de Marie en communion avec toute l’Église. C’est aussi la fête patronale de notre Société et celle de nos Sœurs, les Sœurs Missionnaires de Notre-Dame d’Afrique car notre Fondateur avait, dans les premières années de notre histoire, placé nos deux instituts sous la protection de Marie Immaculée Reine d’Afrique. A cette occasion, notre communauté du Généralat est en communion de prière avec tous nos confrères où qu’ils soient dans le monde, les confiant à l’intercession de Notre Dame que nous invoquons comme notre protectrice. En tant que disciples de Jésus, nous accueillons la Vierge Marie comme notre mère à qui Jésus nous a présentés comme ses enfants (voir Jean 19, 26). Comme toutes nos bonnes mamans, la Vierge Marie nous prodigue fidèlement les soins maternels qu’elle a eus pour son fils Jésus. Alors que nous célébrons notre fête patronale, nous contemplons également notre fraternité avec Jésus avec qui nous sommes, en tant que ses disciples, fils de Marie.

L’Immaculée Conception de Marie est l’un de ces enseignements de l’Église que nous avons du mal à établir clairement à partir des Écritures. L’Évangile d’aujourd’hui (Luc 1, 26-38) invite davantage à une réflexion sur la conception virginale de Jésus que sur l’Immaculée conception de sa mère. Cependant, il me semble que la deuxième lecture (Ephésiens), qui ne mentionne pas la Vierge Marie, nous fournit un terrain possible, significatif et intéressant pour saisir le sens de la fête d’aujourd’hui, non seulement pour la Vierge Marie mais aussi pour nous tous. Il serait inutile que nous célébrions la Vierge Marie pour elle-même et que la fête d’aujourd’hui n’ait rien à voir avec nous.

Dans la perspective offerte par la deuxième lecture, Marie participe à la volonté éternelle de Dieu qui “nous a choisis, dans le Christ, avant la fondation du monde, pour que nous soyons saints, immaculés devant lui, dans l’amour !” Loin d’être une chose exclusivement réservée à la Vierge Marie, l’appel à être sainte et irréprochable, l’Immaculée Conception semble, dès avant la fondation du monde, être destinée à tous.

Notre expérience est cependant différente. La nôtre est celle de la première lecture (Genèse 3, 9-15. 20). C’est une expérience marquée par le péché, par la désobéissance à la volonté de Dieu, qui remonte à nos ancêtres Adam et Eve. Heureusement, la fête d’aujourd’hui est là pour nous rappeler que Dieu ne nous a pas abandonnés dans le péché, pour ainsi dire, nous avons hérité avec Ève, la mère de tous les vivants (et avec Adam le père de tous les vivants). Avec Marie, la nouvelle Ève comme l’appelait Irène de Lyon, il y a une création quelque peu nouvelle. C’est assez frappant. Les études de mariologie démontrent suffisamment comment, dans la Vierge Marie, Dieu établit un nouveau départ. Des mariologistes réputés s’accordent à dire que l’Évangile selon Luc décrit les débuts de la vie de Jésus presque entièrement en termes de l’Ancien Testament, afin de montrer de l’intérieur que l’événement de Jésus est l’accomplissement de ce qu’Israël espérait. En effet, les mots avec lesquels l’Ange salue Marie sont étroitement liés à ceux utilisés par le prophète Sophonie s’adressant à la Jérusalem rachetée des temps eschatologiques (Sophonie 3, 14 – Chante à haute voix, fille de Sion, crie, Israël ! Réjouis-toi et exulte de tout ton cœur, ô fille de Jérusalem !) Dans la péricope de l’Evangile proposé aujourd’hui, Luc reprend également des paroles de bénédiction qui servaient à saluer des femmes célèbres d’Israël comme Judith à qui Ozias dit : O ma fille, tu es bénie par le Dieu très haut placé au-dessus de toutes les autres femmes ; et béni soit le Seigneur Dieu, qui a créé le ciel et la terre (voir Juges 5:24 ; Jdt 13:18).

La Vierge Marie est ainsi dépeinte comme le saint reste d’Israël, la vraie Sion, vers laquelle tout le monde a levé les yeux avec espoir au milieu des misères de son histoire. Dans l’Évangile de Saint Luc, le nouvel Israël commence avec Marie. Elle est la “fille de Sion” en qui Dieu établit un nouveau commencement. Marie apparaît comme la mère de tous ceux qui sont appelés à vivre en Jésus-Christ.

La fête de l’Immaculée Conception de Marie révèle l’accomplissement du projet de Dieu pour que l’humanité soit sainte et irréprochable par Jésus-Christ. La Vierge Marie n’est-elle pas l’exemple parfait de ce que chacun de nous est appelé à être ? Contrairement à Eve, elle est obéissante à la volonté de Dieu. Marie ne doit pas seulement être vénérée, elle est aussi un modèle de vie. En modelant notre vie sur la sienne, nous accomplirons notre vocation d’êtres humains, appelés à être saints en restant attentifs et obéissants à la volonté de Dieu et par notre constance dans la foi.

Stanley Lubungo, M.Afr

De nombreux confrères ont prêté serment lors de la fête de l’Immaculée Conception. Bonne fête à tous. Parmi eux, notre supérieur général, Stan Lubungo, et Stephen Ofonikot, qui ont célébré 24 ans de serment missionnaire.

La polémique du Coronavirus

La polémique du Coronavirus

Bapuoh Pascal, M.Afr. – Un extrait du Lien de la Province Ghana-Nigeria de novembre 2020

The battle against COVID-19

Personne ne sait de quoi demain sera fait. Qui aurait pu croire que l’année 2020 allait être déstabilisée par une bactérie mortelle appelée coronavirus ? Qui aurait pu croire que les gens allaient connaître une distanciation sociale et une auto-quarantaine ? Qui aurait pu croire qu’en 2020, les pays allaient connaître un confinement total ou partiel ? Qui aurait pu croire qu’en cette année, les églises, les marchés, les rassemblements sociaux et les aéroports allaient être fermés, et que la circulation des personnes allait être restreinte pendant de nombreux mois ? Qui aurait pu croire que le port de masques faciaux allait être introduit comme faisant partie du code vestimentaire de 2020 ? Pour la jeune génération du XXIe siècle, c’est une expérience que l’on n’aurait jamais cru possible. Pour d’autres, l’année 2020 est une année sombre où la perversité de certains a conduit à la destruction de vies, de foyers, d’entreprises, de pays et de moyens de subsistance vitaux. Pour d’autres encore, la controverse de 2020 envoie comme signal que les êtres humains devraient prendre la place qui leur revient en tant qu’êtres humains, et laisser Dieu à sa place. L’homme n’est pas Dieu et ne pense pas à sa place.

Avant de partir pour le Congo, je suis resté chez moi pendant environ six mois sans rencontrer qui que ce soit. Je regardais les informations à la télévision sur la façon dont la COVID-19 dévastait le monde, j’écoutais le cri des familles qui étaient détruites par la pandémie de la COVID-19 et je regardais le nombre de personnes qui étaient enterrées chaque jour à cause de la pandémie de coronavirus… Et donc, je me suis demandé ce qu’était la vie. Je me suis demandé ce que la vie pouvait être d’autre. Je me suis demandé quelle était l’essence de la vie.

La pandémie de coronavirus impose une réflexion profonde sur l’essence de la vie. La vie est une précieuse réalité reçue gracieusement de Dieu, elle est très précieuse et sacrée. Et donc, il faut en prendre soin. Oui, la COVID-19 a détruit toute joie en l’an 2020. En effet, il s’agit d’une véritable catastrophe naturelle où les vies, les propriétés et l’économie ont été anéanties. Nous avons bien besoin des paroles du Psaume 121:1-2 pour réconforter nos coeurs brisés : “Je lève les yeux vers les montagnes, d’où vient mon secours ? Mon secours vient de l’Éternel, créateur du ciel et de la terre ». Ce cri du psalmiste devint la prière d’espérance des cœurs brisés, des personnes désespérées et des moins privilégiées qui ne recevaient pas de soins médicaux. C’est la prière de nombreux présidents, chefs religieux, personnel médical et autres activistes sociaux dont les interventions professionnelles n’ont pas abouti au résultat escompté. C’est la prière qui vient du plus profond du cœur des enfants qui ont vu leurs parents mourir. C’est la prière des familles qui ont dû enterrer leurs parents, leurs proches et leurs amis dans des conditions terribles. C’est la prière de nombreuses personnes qui ont perdu tout espoir dans leur vie, qui ont perdu presque tous leurs proches. C’est une prière qui fait que beaucoup de gens se mettent à genoux et crient du fond du cœur.

Alors que le coronavirus imposait déjà une souffrance naturelle, d’autres personnes aggravaient la souffrance des gens en manipulant le prix de ce qu’ils vendaient. Certains marchands se sont laissés entraîner dans les pratiques de marchandage frauduleuses que le prophète Amos condamnait déjà dans son livre (Amos 8:5-6) où les marchands, désireux de profiter de la situation, trompaient leurs malheureux clients en leur fournissant de mauvais produits et en utilisant des balances douteuses. Les pauvres n’avaient d’autre choix que de se plier à la hausse injuste du coût des produits pour survivre. D’autres personnes se sont enrichies de la situation déplorable des pauvres. De faux médicaments contre les coronavirus ont été fabriqués et vendus à des coûts élevés. Au nom des pauvres et des personnes touchées par la COVID-19, de nombreux projets ont été écrits et sont aujourd’hui subventionnés. Des pays et des individus reçoivent des fonds pour aider à soulager la situation des personnes touchées, mais combien de ces pauvres et des personnes atteintes de la COVID-19 ont été aidées, en particulier en Afrique ? Peut-être une poignée. Des équipements de protection individuelle destinés à la lutte contre la COVID-19 ont été vendus illégalement par des hôpitaux et des centres de santé. Les projets qui ont été écrits et subventionnés dans le but d’aider une communauté donnée à lutter contre le coronavirus restent une utopie. Les supposés bénéficiaires ne savent même pas que leur situation lamentable a été utilisée par certains autres pour chercher de l’argent afin de s’enrichir.

Alors que des personnes bien intentionnées tentaient de contribuer à la lutte contre la pandémie, d’autres, assoiffées de s’enrichir, ont contrecarré les efforts de ces personnes bienveillantes. Controverse sur le coronavirus. Comme le nombre de cas de personnes touchées ne cesse d’augmenter, cela torture le cœur de nombreuses personnes qui se posent évidemment une litanie de questions.

Le coronavirus (bien que réel) est-il une propagande politique ? Certains individus et pays utilisent-ils l’aide d’urgence pour leurs propres rassemblements politiques et leur propagande personnelle ?

Un pays sera-t-il assez honnête pour publier à l’intention de ses citoyens le montant total de l’aide reçue des personnes et des groupes, et indiquer clairement et fidèlement comment cette aide a été utilisée ? S’agira-t-il d’un récit sur papier ou d’une preuve que tout le monde peut voir ? La COVID-19 ne nous a pas seulement appelés à faire preuve de solidarité, mais elle a également appelé nos dirigeants politiques à être sérieux avec les citoyens de leur pays, en particulier pour améliorer les installations sanitaires dans leur pays. L’année 2020 sera inoubliable. C’est une année révolutionnaire. Elle a ouvert une nouvelle phase dans l’histoire du monde. Il y a une raison à tout. Que Dieu accueille dans son royaume les âmes défuntes dues à la COVID-19, et qu’Il mette au cœur des vivants l’esprit d’une solidarité sincère.

Fr. Bapuoh Paschal, M.Afr.

Stanley Dye, R.I.P.

Société des Missionnaires d'Afrique

Le Père Hugh Seenan, Délégué Provincial du secteur de Grande-Bretagne,
vous fait part du retour au Seigneur du Père

Stanley Dye

le dimanche 6 décembre 2020 au Pays de Galle (Grande Bretagne)
à l’âge de 67 ans dont 34 ans de vie missionnaire
au Soudan et en Grande Bretagne.

Prions pour lui et pour ceux qui lui étaient chers.

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Aux prises avec la Covid-19 à Katakwi

Aux prises avec la Covid-19 à Katakwi

L’expérience de la COVID-19 peut être comparée à celle de Noé, ou à celle de Sodome et Gomorrhe, lorsque les gens mangeaient, buvaient et vaquaient à leurs propres occupations. Comme si nous ne faisions que manger et boire et pécher ! Mais non, nous avions nos propres plans et élaborions notre propre programme d’activités, afin de faire avancer les choses en 2020.

En tant que communauté, nous avions déjà prévu que Rémi partirait en vacances en juin et reviendrait probablement en septembre, puis que Josephat partirait. Notre stagiaire Yannick chantait partout les chants burkinabés, car il savait qu’il allait bientôt renouveler sa déclaration d’intention et dire au revoir à Katakwi. Quant à notre diacre, il se préparait à rentrer chez lui pour être ordonné, lorsqu’il serait appelé.

Notre programme pastoral était planifié de février à avril, chacun savait dans quel poste il se rendrait à telle ou telle date, etc. Nos projets pastoraux les plus importants étaient bien planifiés et leur exécution avait commencé : la construction de l’église, la collecte de fonds, le programme d’apostolat des jeunes, le bâtiment de l’école et tout un tas d’allées et venues. Au niveau diocésain, le programme pastoral était lancé.

Notamment, l’évêque avait indiqué clairement que nous devrions tous nous donner la main pour construire la nouvelle cathédrale et renforcer le travail pastoral à la base, en rapprochant les sacrements des gens. Cela permettrait d’éviter que nos chrétiens ne soient induits en erreur par les chrétiens appartenant à certaines sectes. Puis, tout à coup, nous avons entendu parler d’une maladie qui avait débuté en Chine et qui se répandait comme une rumeur de village. En un clin d’œil, nous avons commencé à entendre que cette maladie était en Espagne, en Italie, en France et en Allemagne. Au début, nous nous sommes dit que c’était une maladie européenne et qu’elle ne nous atteindrait pas ici. Tout cela alors que nous étions encore en train de faire du bon travail, et nous étions convaincus que nos plans et nos projets étaient toujours en cours. Pourtant, dans un revirement surprenant et effrayant, il semblait que le monde touchait à sa fin ou se mettait en pause, car toutes les activités étaient suspendues en Ouganda et dans tous les pays voisins.

J’étais parti à Soroti pour faire des achats. Là-bas, un commerçant indien m’a montré un message sur WhatsApp qui était très effrayant. L’information contenue dans le message était que le virus était en Ouganda et que les cas étaient beaucoup plus nombreux que ce que nous avions entendu à la télévision, même dans les villages voisins de Soroti. J’ai eu peur et je me suis méfiée de tous ceux que je rencontrais ce jour-là, comme s’ils avaient contracté la maladie de Covid-19.

Plus tôt dans l’année, nous avions eu une invasion de criquets, ce qui était également effrayant. Je ne connaissais le criquet pèlerin que par la biologie, pendant mes études secondaires, et l’image que j’avais des criquets n’était rien de moins que la destruction, la faim et la pauvreté. Pour reprendre les mots de certains commentateurs, je dirais : quelle drôle d’année ! Une année de surprises, une année de déceptions, une année d’angoisses, une année de tristesse, mais dans un autre sens, une année qui nous rassure sur la présence constante de Dieu dans le parcours de l’humanité.

Malgré toute cette confusion, nous avons d’abord essayé de prendre nos précautions, en achetant suffisamment de nourriture et d’autres produits de première nécessité pour la maison, et nous avons également acheté des désinfectants et des masques pour être sûrs d’être protégés. Nous avons suivi attentivement les nouvelles tous les jours pour nous tenir au courant de la progression de la pandémie en Ouganda ainsi que dans d’autres pays. Nous étions très préoccupés par la situation à Rome, qui est le siège de l’Église, et l’Italie était l’un des pays les plus touchés. Mais également, parce que notre Conseil général s’y trouve, beaucoup de nos confrères y étudient et, en général, beaucoup de prêtres et de religieux vivent à Rome. Nous avons aussi fait preuve de compassion envers le pays des autres confrères. D’abord le Burkina, puis le Ghana et enfin le Malawi pour ce qui est de la façon dont les cas de Covid étaient enregistrés. Surtout, nous avons tous été fidèles pour écouter le président de l’Ouganda et ses ministres qui ont guidé le pays dans le confinement.

 

Ces photos de Katakwi sont tirées d’Internet et ne sont pas directement liées à l’article.

Tout n’était pourtant pas perdu, nous nous sommes mis à prier, demandant à Dieu d’intervenir et de laisser le Corona quitter la surface de la Terre. Nous avons également encouragé les familles à prier à la maison. Beaucoup de nos chrétiens disaient que le confinement était l’œuvre du diable pour interrompre notre liturgie, mais nous avons essayé de les aider à saisir cette occasion pour renforcer la prière familiale qui disparaît rapidement dans de nombreuses familles chrétiennes. Nous les avons également encouragés à considérer cette pandémie comme une occasion de renforcer le lien et l’unité de la famille, car beaucoup d’entre eux n’ont pas eu cette chance d’être ensemble depuis longtemps.

De notre côté, nous avons poursuivi les messes quotidiennes dans notre chapelle où, unis par l’esprit à tous nos chrétiens, nous avons continué à prier pour nos chrétiens confrontés aux défis quotidiens et surtout pour que le monde puisse vaincre la COVID. Dans la même veine, nous avons demandé l’esprit de discernement pour comprendre quel message Dieu nous adresse au travers de cette pandémie, afin que nous puissions apprendre et répondre positivement à l’appel de Dieu. Pour atteindre tous nos chrétiens, nous avons également eu recours à des messes radiophoniques ainsi qu’à des lectures et des réflexions sur l’Évangile sur Facebook et WhatsApp, continuant ainsi à nourrir la vie spirituelle de nos chrétiens.

Nous avons continué à visiter les malades, à administrer le sacrement de l’onction des malades, le viatique et la réconciliation, et à donner des conseils à divers degrés à ceux qui venaient à la paroisse. Je peux dire que nos chrétiens sont vraiment restés avec nous pendant ces moments difficiles, car beaucoup d’entre eux étaient très soucieux de notre subsistance. Ils venaient nous saluer et s’informer de l’état des choses ; certains venaient avec des denrées alimentaires, d’autres avec leur offrande et leur dîme, etc. pour s’assurer que la paroisse continuerait à fonctionner.

Nous avons également poursuivi les activités qu’il était possible de continuer, comme la construction de trois salles de classe dans la succursale de Kaikamosing, la construction du dernier soubassement de l’église, le carrelage et les autres finitions des toilettes de l’église, etc. Plus intéressant encore, nous avons fait un peu d’agriculture afin d’encourager nos gens à penser que si tout le reste venait à s’arrêter, l’agriculture pouvait continuer, car nous aurions encore besoin de manger. Ainsi, nous avons eu un verger de papayes, un champ de légumes, de matoke, d’arachides, etc. Cela nous tenait suffisamment occupés et en bonne santé pour lutter contre le virus, alors que nous attendions joyeusement la récolte. Nous avons aussi fait du sport : football, basket-ball, etc. avec nos jeunes pour améliorer la condition physique aussi.

De plus, nous avons planté quelques arbres et fleurs autour de la maison et de la nouvelle école. Et des plans sont en cours pour planter des arbres autour de la nouvelle église. Nous rendons hommage à nos prédécesseurs qui avaient planté beaucoup d’arbres autour de la paroisse, dont nous profitons aujourd’hui en leur absence ; peut-être que si nous faisions tous de même, le monde ne souffrirait pas aujourd’hui de la COVID-19.

En conclusion, nous disons que, bien que la pandémie ait dévasté le monde, il y a tant de bonnes choses que le monde a pu apprendre.

Nous devons surtout penser aux effets de tout ce que nous prenons plaisir à faire. Nous prions pour tous ceux qui sont morts à cause de COVID-19 ou de ses conséquences. Qu’ils reposent en paix et que le Seigneur sauve le monde de cette pandémie et d’autres pandémies.

Josephat Diyuo (Un missionnaire d’Afrique du Ghana, en mission en Ouganda)

Un mot du Provincial de GHN

Un mot du Provincial de GHN

Un extrait du Lien de la Province Ghana-Nigeria de novembre 2020

Fr. John Aserbire, M.Afr.

Vous êtes-vous demandé pourquoi certaines personnes restent calmes face à la crise, alors que d’autres sont effondrées ?

Certaines personnes sont capables de traverser les hauts et les bas/difficultés de la vie et sont capables de rebondir après une crise. En effet, la Covid-19 a causé et cause encore (avec la nouvelle vague) de nombreux revers aux populations, aux institutions, aux organisations, aux nations, aux gouvernements, etc. Dans notre Lien de mai 2020, on a beaucoup écrit sur Covid19.

Il y a une semaine, on m’a demandé de prêcher une récollection à nos candidats à la maison de formation Saint-Martin de Tours à Ejisu, et de présider la cérémonie de réception des premières années. J’ai alors décidé de réfléchir à la RÉSILIENCE en temps de crise. Cette « capacité à s’adapter aux changements de vie stressants et à rebondir après une épreuve ». Je savais que, comme chacun d’entre nous, la plupart de nos candidats, sinon tous, éprouvaient des difficultés et des déceptions. Pour les encourager, j’ai cherché dans la Bible des exemples de femmes et d’hommes courageux qui ont fait preuve de résilience dans les moments difficiles. En fait, la Bible contient de nombreuses citations sur la façon de surmonter les difficultés et les tentations et de persévérer face aux épreuves (Jacques 1:12).

Elle nous donne également de nombreux exemples de femmes et d’hommes qui ont beaucoup souffert, mais qui ont continué à suivre le plan de Dieu pour leur vie. Parmi eux, on peut citer Job et Saint Paul.

Après avoir tout perdu, Job éprouvait une grande angoisse de l’âme et du corps, mais il refusait de maudire le Seigneur ou de baisser les bras (Job 1:22). Il savait que Dieu était au contrôle, et cette certitude l’aidait à surmonter ses difficultés au lieu de céder à la défaite. Sa foi lui a permis de faire preuve de résilience. Après avoir rencontré Jésus, qui a changé sa vie, Paul a fait preuve d’une grande résilience (Actes 9). Il est passé du statut de pharisien religieux à celui de chrétien radical. Il a été battu, lapidé, critiqué, emprisonné et presque tué à plusieurs reprises (2 Corinthiens 11:24-27). À Lystre, en Asie Mineure, il a été lapidé, traîné hors de la ville et laissé pour mort, mais, lorsque ses ennemis sont partis, Paul s’est simplement levé et est retourné dans la ville (Actes 14:19-20). La résilience divine nous permet de poursuivre notre mission, quelles que soient nos crises et nos souffrances.

La clé de la résilience est la foi dans le Seigneur : « L’Éternel affermit les pas de celui qui l’aime ; s’il trébuche, il ne tombera pas, car l’Éternel le soutient de sa main » (Psaume 37:23-24). Saint Paul nous dit : « Nous sommes accablés de toutes parts, mais non écrasés ; perplexes, mais non désespérés ; persécutés, mais non abandonnés ; frappés, mais non détruits » (2 Corinthiens 4, 8-9). En tant que chrétiens, nous rebondissons sans cesse. Nous continuons à avancer dans la foi.

L’un des aspects étonnants de la résilience est que beaucoup d’entre nous n’ont pas réalisé à quel point nous étions résilients jusqu’à ce que nous nous retournions sur les moments difficiles de notre vie et que nous voyions le simple fait que nous avions réussi, que nous avions appris quelque chose et que nous avions assez de foi pour continuer. En marquant la fin de l’année liturgique et le début de la nouvelle saison de l’Avent, je vous souhaite d’avoir la force de rester positifs, de garder la foi et de continuer à avancer. Temps béni de l’Avent !

John Aserbire, M.Afr.

Lien de la Province Ghana-Nigeria – Novembre 2020

Lien de la Province Ghana-Nigeria - Novembre 2020

Vivre le célibat avec intégrité (réservé aux Miss. d’Afrique)

Vivre le célibat avec intégrité

La solitude et la sexualité

Martin Grenier, assistant général supervisant l’intégrité du ministère, a reçu l’autorisation de « Emmanuel Convalescent Foundation » en Ontario de publier ce livret fort intéressant, pour l’usage exclusif des Missionnaires d’Afrique. Je me suis permis de le transcrire en anglais, car la copie dont nous disposons n’est pas très confortable à lire, et de le traduire en français, en demandant à Stéphane J., PHD, de relire la traduction pour que les confrères qui sont moins à l’aise en anglais puissent profiter de ce contenu très intéressant. Vous trouverez au bas du document, le PDF de l’original en anglais. Bonne lecture.

Philippe Docq

AVANT-PROPOS

Peu de sujets semblent donner lieu à des conversations aussi soutenues et diversifiées que ceux liés à la sexualité. En particulier dans le contexte religieux, il y a une longue histoire de réflexion, de débat et même de discussions. Le choix du célibat volontaire a suscité sa propre part de discussion au fil des ans et a de nouveau fait l’objet d’une attention particulière ces derniers temps.

Au long des années, divers commentateurs, des évangélistes aux spécialistes des sciences sociales, ont examiné, expliqué, exhorté, confirmé ou condamné le rôle du célibat en tant que valeur évangélique. Ces dernières années, il est redevenu à la mode de décrire en détail la façon dont le célibat est vécu par ceux qui le professent — souvent avec des conclusions embarrassantes et brutales. Et tant de personnes dans l’Église se retrouvent à revenir, perplexes, sur la question fondamentale : de quoi parlons-nous exactement ? Que signifie réellement un engagement au célibat pris pour des motifs religieux ou spirituels ?

C’est sur cette question que se penche la présente réflexion. Les membres du personnel de Southdown ont été invités à participer à la célébration du 10e anniversaire du programme Ministère des prêtres au Canada. Lors de la conférence de Montréal, le docteur Gilmartin a été invité à examiner cette question spécifique dans l’une des principales présentations. Le texte qui suit est une adaptation et un remaniement de cet exposé. Bien qu’il s’adresse à l’origine aux prêtres du Canada, je suis convaincu que toutes les femmes et tous les hommes qui exercent un ministère y trouveront des éléments de réflexion stimulants et éclairants.

Le docteur Gilmartin apporte une expérience personnelle et professionnelle d’une richesse unique à ses travaux. Pendant plus de 25 ans, il a travaillé avec le clergé et les religieux en tant que thérapeute et éducateur. Avant de rejoindre l’équipe de Southdown il y a quelques années, il a été pendant de nombreuses années directeur de la « House of Affirmation » (Centre de soins pour les prêtres avec des problèmes psychologiques et psychosexuels) aux États-Unis et a donné des conférences dans le monde entier sur les soins préventifs aux ministres. Une grande partie de sa formation clinique a été effectuée dans la région de New York et son doctorat en psychologie a été obtenu à l’université de Kensington en Californie.

C’est un plaisir de le présenter à nouveau à nos lecteurs et de fournir une autre brochure de notre série éducative conçue pour stimuler les questions et provoquer des réactions sur des sujets qui préoccupent les ministres de l’évangile d’aujourd’hui.

John Allan Loftus, S.J., Ph. D.
Directeur exécutif

Introduction

Alors que je me préparais à rassembler quelques réflexions sur ce sujet, il m’est venu à l’esprit qu’il manquait la mention de la honte dans le titre. Plus je parle au clergé et aux religieux des questions de célibat, de solitude et de sexualité en rapport avec l’intégrité, plus je me rends compte que la honte en est le thème central. En fait, la honte est le thème central chaque fois que nous parlons du clergé d’aujourd’hui. La honte… la honte découlant de toutes les accusations publiées dans les journaux concernant les abus commis par le clergé… comment cela peut être lié au nombre décroissant de jeunes gens attirés par la noblesse de cette profession… une réponse personnelle qui peut être ressentie par chacun d’entre nous lorsqu’un autre est accusé d’un comportement abusif que, « Peut-être y a-t-il des événements dans ma propre histoire dont je crains désespérément qu’ils ne fassent surface un jour… » Peut-être des sentiments concernant la représentation d’une Église qui est considérée par beaucoup comme ayant institutionnalisé ses abus envers les gens. Bien que la honte n’entre pas dans le cadre de cette brochure, il est important que nous reconnaissions qu’elle se cache à l’arrière-plan ; il est également important que chacun d’entre nous prenne contact avec sa propre honte et, avec un peu de chance, s’en libère.

« Célibat… sexualité… solitude… intégrité » : cela fait beaucoup à traiter dans un seul livret ; chacun d’entre eux pourrait constituer un livret à lui seul. Mais mettons tout cela ensemble et voyons ce que cela donne.

La première tâche consiste à libérer notre esprit des idées préconçues. Reconnaissant que le plus grand obstacle à la vérité est l’illusion de la connaissance, abandonnons l’illusion que « nous savons déjà », et cherchons la vérité sous un angle nouveau de compréhension.

J’ai entendu l’histoire d’un couple de la classe moyenne supérieure qui avait un enfant, une fille, qui était au centre de leur vie. Au fur et à mesure de son enfance et de son adolescence, elle ne leur a jamais donné une raison de ne pas être fiers d’elle ; elle était populaire auprès de ses camarades de classe, participait à toutes ces activités que vous aimez que les enfants pratiquent, et réussissait superbement à l’école. En dernière année de lycée privé paroissial, elle était à la fois présidente de classe et première de sa classe sur le plan scolaire. Elle a été acceptée dans le programme de préparation aux études de médecine d’un prestigieux collège de l’Ivy Ligue. À la moitié de son second semestre, elle a envoyé une lettre à ses parents et voilà ce qui s’est passé :

« Chers papa et maman,

Après ma visite chez vous à Noël, j’ai décidé qu’il fallait que je fasse quelque chose pour moi, alors je me suis inscrite à un programme de traitement de la toxicomanie. Dans ce programme, j’ai rencontré le plus gentil des garçons et nous prévoyons de nous marier, avec un peu de chance avant l’arrivée du bébé. Mais, ne vous inquiétez pas, il a un cousin qui vit dans une localité retirée en plein désert et nous avons été invités à aller vivre avec lui ».

Le deuxième paragraphe débutait comme ceci :

« Rien de tout cela n’est vrai, mais je vais obtenir un D en chimie… »

Le propos de l’histoire est une question de perspective… voir les choses dans une perspective plus large. Il en va de même pour les sujets que nous allons aborder ; gardons une perspective en nous accrochant à un contexte plus large.

Commençons par voir si nous pouvons parvenir à une compréhension commune de la signification de chacun de nos termes. Que signifie le célibat ? Que signifient l’intégrité et la solitude ? Qu’est-ce que la sexualité ? Tout d’abord, le célibat.

Je travaille avec le clergé catholique romain/religieux depuis 1968. Il ne s’agit pas seulement de quelques années à essayer de comprendre les célibataires engagés ; c’est une foule de prêtres, de sœurs, de frères, d’évêques avec lesquels j’ai discuté des problèmes liés au célibat, y compris de sa signification, mais je ne trouve guère de consensus sur ce qu’il signifie. Cela vient en grande partie de la confusion entre chasteté et célibat. La chasteté nous lie tous, quel que soit le mode de vie que nous avons adopté. Que nous soyons mariés ou non, engagés envers une autre personne ou célibataires, les mêmes commandements nous lient. Je pourrais continuer à parler de la « chasteté du célibat » par rapport à la « chasteté du mariage », mais cette « distinction » peut créer plus de problèmes qu’elle n’en résout. Il en va de même pour le concept de « continence parfaite » tel qu’exprimé dans la « chasteté célibataire » et la « chasteté non mariée ». Lier le célibat à la chasteté rend plus difficile de trouver dans le célibat une valeur qui améliore la vie. Votre vœu ou promesse de célibat ne concerne pas l’observation des sixième et neuvième commandements ; vous avez déjà l’obligation de le faire bien avant de prononcer le vœu. Pourquoi devriez-vous faire le vœu de faire quelque chose que vous avez déjà l’obligation de faire ? Vous ne faites pas le vœu de ne violer aucun des autres commandements. Qu’y a-t-il de si spécial dans les sixième et neuvième qui nécessite un vœu ? Je suggère qu’une personne ne fait pas vœu de chasteté, mais plutôt de célibat, ce qui a peu à voir avec le fait d’être chaste.

Que signifie donc être célibataire ? Une définition du célibat sur laquelle il y a accord est que le célibat signifie rester non marié, ou mieux, rester non engagé dans cette unité sociétale de base qui s’appelle « un couple ». Le célibat a beaucoup plus à voir avec le message de l’Évangile selon lequel il est indigne du Royaume si nous faisons passer quoi que ce soit « avant » le Seigneur ; rien ne doit s’interposer entre vous et Dieu. En faisant le vœu de rester célibataire, vous exprimez radicalement votre totale loyauté et votre engagement envers Dieu/Jésus. Non seulement cette loyauté farouche rejette toute ingérence, mais elle tente même d’éliminer toute distraction de la totalité de votre engagement envers le Seigneur. Dietrich Bonhoeffer, dans sa Lettre depuis la prison, suggère quelque chose dans ce sens lorsqu’il dit que le motivateur ultime de la personne morale est « l’allégeance exclusive à Dieu », c’est-à-dire que la personne pleinement morale est celle « qui essaie de faire de toute sa vie une réponse à la question et à l’appel de Dieu ».

En outre, lorsqu’une personne s’engage dans le célibat, elle entre dans un mode de spiritualité qui diffère de la spiritualité du non-célibataire, que ce dernier soit marié ou non. Un célibataire n’est pas simplement un célibataire ou une célibataire : le célibat n’est pas non plus lié à un état de virginité ; il ne peut pas non plus être un moyen d’éviter l’amour. Il doit être une façon d’aimer, un amour qui embrasse à la fois Dieu et les gens. Le célibat doit faciliter cet amour, c’est-à-dire devenir une spiritualité, sinon il n’est rien d’autre qu’une condition d’emploi ou une commodité institutionnelle.

Je trouve inutile d’assimiler le célibat à la chasteté ; cela nous empêche non seulement de comprendre quelle est la valeur d’un engagement de célibat (une valeur qui a conduit à ce que l’engagement de célibat fasse partie de toutes les grandes religions du monde, à l’exception du judaïsme post-dispersion qui accorde une plus grande signification morale au fait d’être un conjoint et un parent), mais cela élève également la chasteté à une position centrale dans une tradition morale chrétienne, éclipsant de loin l’amour.

Je veux éviter le romantisme en essayant de saisir le sens du célibat. De plus, je ne veux pas confondre la valeur du célibat avec celle d’en faire une exigence pour le sacerdoce. À ce stade, je laisse aux théologiens et aux experts de la vie spirituelle le soin de nous amener plus loin dans la compréhension du célibat comme une voie de spiritualité. Tournons notre attention vers la façon de le vivre avec intégrité.

Définissons l'intégrité

« Intégrité » est un mot encore plus difficile à définir. Dans ma pratique de la psychothérapie, j’ai travaillé avec de nombreuses personnes qui vivent leur vie d’une manière différente de la mienne, et d’autres qui vivent d’une manière qui serait déclarée répréhensible par le commun des mortels, mais qui, aux yeux d’une personne, prétendrait presque vivre avec intégrité. La plupart d’entre nous, si ce n’est tous, veulent être des personnes intègres. Cela peut être lié à une observation que feu l’évêque Fulton Sheen a faite lorsqu’il a dit que si les gens ne vivaient pas comme ils pensent qu’ils devraient, ils se sont vite mis à penser comme ils vivaient. Il est très difficile de s’approprier un manque d’intégrité en soi. C’est ce qui donne à la « négation » un tel pouvoir comme défense psychique. Sentir que nous possédons de l’intégrité est fondamental pour un sentiment de bien-être.

Que signifie « intégrité » ? C’est un concept chargé de valeurs et subjectif ; chacun de nous le définirait différemment. Je peux penser à trois différents niveaux de signification de « l’intégrité » et il est utile d’examiner chacun d’entre eux, car ils contiennent des indices sur la façon dont le célibat est vécu avec intégrité.

Une façon de définir l’intégrité est de la considérer comme une stricte adhésion à un code de comportement. De cette façon, le célibat devient une chose très simple. Pour vivre le célibat avec intégrité, il suffit d’obéir à la loi, qu’il s’agisse de la loi de l’Église, de la loi de la Chancellerie, de la loi adoptée par un chapitre ou un concile, ou de ce que la règle ou la Constitution dit de faire. C’est clair et net. Les lacunes dans cet exercice de l’intégrité du célibat sont ce qui fait tant parler d’elles dans les médias, et ce qui préoccupe tant le gouvernement civil. Il existe des lois qui définissent ce qui constitue un comportement sexuellement abusif ou agressif et si nous choisissons de ne pas tenir compte de ces lois ou d’y désobéir, nous serons obligés d’en assumer les conséquences.

Cela ne concerne pas seulement les relations sexuelles avec des enfants, ou lorsque la coercition physique ou psychologique est utilisée pour obtenir du sexe, mais de plus en plus, le gouvernement civil impose au professionnel du culte une norme de conduite qui lie la plupart des autres professionnels. Certaines juridictions civiles considèrent que les relations sexuelles entre un membre du clergé et toute personne dont il a la responsabilité pastorale constituent essentiellement une violation de la responsabilité professionnelle et, par conséquent, un abus sexuel de facto. Une personne qui enfreint la loi manque d’intégrité aux yeux des autorités civiles ; elle viole une norme requise pour soutenir la justice et prévenir la victimisation.

Sur le plan religieux, est-ce tout ce qu’il y a à faire pour le célibat ? Il suffit de suivre les règles de l’Église et de l’État ? Est-ce là tout ce que vous avez promis ou juré de faire ? J’espère que non ! Cela peut trop facilement être une échappatoire à la responsabilité d’une relation sexuelle adulte, une sanctification d’un développement sexuel arrêté ou retardé, ou être considéré comme une condition d’emploi, c’est-à-dire que vous vouliez être prêtre/frère/sœur et qu’on vous a fait prendre cela comme faisant partie du paquet. En quoi cela donne-t-il la vie ? En quoi cela fait-il de vous une personne plus aimante, un exemple à suivre pour les autres, ou même un meilleur chrétien ? Ce n’est pas le cas.

Une deuxième définition de l’intégrité est « un état de non -altération », c’est-à-dire être extérieurement ce que l’on est intérieurement, être ce que l’on est censé être, vivre sans intentions cachées qui trompent, vivre honnêtement. Ce niveau d’intégrité dit que ce que vous voyez est ce que vous obtenez, je suis ce que je suis censé être.

En tant qu’ecclésiastique, ou religieux consacré, vous assumez un rôle de défenseur public des valeurs de l’Évangile, et l’on attend de vous que vous vous efforciez de vivre ces valeurs dans votre propre vie. C’est particulièrement important dans une institution comme l’Église catholique romaine, qui n’a pas de système de responsabilité envers les personnes que vous servez. En tenant compte de la fragilité humaine, on attend de vous que vous viviez votre vie dans le cadre moral de l’Église. Mais, encore une fois, est-ce là tout ce que signifie le célibat ?

Une troisième définition est celle qui me semble la plus significative et, peut-être, la plus pertinente pour notre sujet. Ici, l’« intégrité » est définie comme la complétude… l’unité… la condition de n’avoir aucune partie ou élément qui veuille… être entier… être complet.

C’est à ce niveau que se situe le défi du célibat : c’est-à-dire vivre le célibat de manière à ce qu’il complète votre personnalité, de manière à ce que, grâce à votre célibat, vous deveniez une personne entière, et non pas malgré le célibat. C’est dans ce sens que le célibat peut devenir une source de vie.

Qui donc ne vit pas le célibat avec intégrité ? Est-ce le prêtre qui a une relation hétérosexuelle/homosexuelle continue avec un autre ? Il échoue certainement dans la première définition, et probablement dans la seconde, mais que dire de la troisième ? Prenez la personne qui, non seulement ne se livre à aucune activité érotique, mais qui a atteint un état où elle n’a même pas de pensée, de sentiment ou de désir érotique. En fait, cette personne a réussi à éradiquer toute passion de sa vie et, par conséquent, elle est devenue un isolé émotionnel, dépourvu de toute vie affective : a-t-elle vécu le célibat avec intégrité ? Une telle personne semble être d’accord avec notre première définition et peut-être le deuxième, mais il est certainement en violation du troisième. Il est vrai que les deux font preuve d’un certain manque d’intégrité, mais lequel est coupable du plus grand manque ? Ne devrions-nous pas nous préoccuper tout autant de ceux qui violent l’intégrité dans le troisième sens que nous le faisons dans les deux premiers ? J’espère que nous considérons tous le célibat comme une façon d’aimer, plutôt qu’une « façon d’éviter l’amour ». Toute autre approche serait incompatible avec notre engagement en tant que chrétiens ou avec les valeurs de l’Évangile.

En quête de la plénitude

Qu’est-ce qui constitue alors un « célibat intègre » ? Comment s’efforcer d’atteindre l’intégrité dans le contexte du célibat ?

Le célibat doit être compris comme distinct de la chasteté. Il ne s’agit pas de minimiser l’importance de cette dernière, mais le fait de l’assimiler à la chasteté constitue un obstacle à la compréhension du potentiel de vie du célibat. De plus, considérer le célibat en termes de disponibilité dans le ministère, c’est déformer complètement la réalité d’un engagement conjugal et la façon dont cela peut renforcer un engagement ministériel. Il y a une certaine valeur à voir le célibat comme étant lié à la spiritualité, à la solitude, à la communauté et au don de soi. Il peut être utile de réfléchir aux raisons pour lesquelles si peu de dirigeants mondiaux sont célibataires (assimilant le mariage, pour les besoins de la discussion, au fait d’être couplé avec un autre) et pourquoi si peu de personnes parmi les plus créatives de l’ère moderne (par exemple les philosophes, les artistes, les compositeurs) ont été mariées (encore une fois, pour les besoins de la discussion, assimilant cela au fait d’être solitaire). Cela nous donne-t-il une idée de la valeur du célibat, de son lien avec la solitude et du besoin de solitude pour la créativité et pour un type de spiritualité ? Il n’y a pas eu de mouvement religieux important, à large assise, qui n’ait pas reconnu une place pour le célibat engagé en son sein.

Puisque ce sont les « personnes » qui sont célibataires, permettez-moi de faire quelques commentaires sur le concept de personne. Pour comprendre ce qu’est une personne dans un sens holistique, il y a deux perspectives auxquelles nous devons nous accrocher en permanence ; perdre de vue l’une ou l’autre peut nous conduire à des préjugés, dont nous sommes trop souvent coupables. Premièrement, toute compréhension de la « personne » doit être ancrée dans la biologie/physiologie. Cela ne veut pas dire que la psychologie, la sociologie, la philosophie, la théologie, etc. ne sont pas importantes, mais nous devons fonder notre concept de la personne sur une base biologique. La nature nous a donné deux instincts de base fondés sur la physiologie : le premier est de se maintenir en vie (donc la faim, la soif, la chaleur, etc.) et le second est d’envoyer ses gènes dans le futur (donc le sexe). De plus, ces instincts n’ont pas été conçus pour fonctionner dans l’environnement relativement bénin de l’Amérique du Nord, mais dans les jungles de l’Asie du Sud-Est, les déserts d’Afrique, les marécages d’Amérique du Sud. Nous sommes des animaux qui ont été conçus par notre Créateur pour donner la priorité à la survie, qu’il s’agisse d’un individu ou d’une espèce. C’est ce que nous sommes, bien que pas totalement, mais certainement de manière fondamentale.

Sans perdre cela de vue, nous devons également nous pencher sur ce que nous sommes appelés à être afin de comprendre notre identité. Si nous perdons cela de vue, alors notre vision de la personne n’est que partielle et trompeuse. Nous nous appuyons ici sur la philosophie, la théologie, la révélation ou sur tout ce qui nous informe à ce sujet. Je choisis de m’appuyer sur la connaissance de la psychologie, fondée sur une compréhension biologique, et avec mes yeux sur l’horizon élargi de ce que notre religion, notre évangile, notre église nous dit sur ce que nous pouvons être. J’espère que cela me donnera la sagesse nécessaire pour parler de la personne et des choses qui nous touchent en tant que personne.

Les personnes font l’expérience de la solitude. Nous savons probablement tous ce que c’est de se sentir seul, mais qu’est-ce que la solitude ? Dans toutes les études de type enquête réalisées sur le clergé ou la religion catholique romaine et sur les questions qui touchent leur vie, la solitude apparaît à maintes reprises comme un facteur important qui influence leur bonheur. Notre expérience nous dit qu’il ne s’agit pas seulement d’une question cléricale, mais qu’elle affecte la vie de la plupart des Nord-Américains. Il suffit d’examiner les thèmes de la publicité pour remarquer à quelle fréquence ce qui est réellement vendu dans le produit proposé est le soulagement de la solitude ; si nous conduisons cette voiture, utilisons ce déodorant, portons ces jeans de marque, nous serons aimés, admirés, respectés par les autres qui rempliront alors le vide dans notre vie et nous soulageront ainsi de notre solitude.

Mais la question demeure : qu’est-ce que la solitude ? Est-ce une maladie ou une affection ? Y a-t-il quelque chose qui ne va pas chez nous parce que nous nous sentons seuls ? Ce n’est pas une maladie, ni psychologique ni physique, et cela n’indique aucun défaut en nous ; ce n’est même pas un ennemi à éviter à tout prix. La solitude est en fait une amie dans le sens où la douleur physique est une amie. C’est un signal, un avertissement que quelque chose ne va pas et que nous devons être attentifs et agir avant qu’un mal plus grand ne soit fait. C’est la capacité à ressentir la douleur physique qui nous empêche de nous détruire et nous permet de survivre à l’âge adulte ; c’est aussi la capacité à ressentir la douleur psychique qui nous permet de vivre une vie psychologiquement saine. La solitude est une douleur psychique. Tout comme la douleur physique est un avertissement que quelque chose ne va pas dans notre corps et que nous ignorons l’avertissement à nos risques et périls, la solitude est un avertissement que quelque chose ne va pas dans la façon dont nous vivons notre vie et que nous l’ignorons à nos risques et périls. En ce sens, la solitude est un ami précieux et digne de confiance. Je peux choisir d’endurer la douleur, qu’elle soit physique ou psychique, pour une valeur plus élevée, mais la douleur dit toujours : « Faites attention… Quelque chose ne va pas… Agissez !

Lorsque nous ressentons la solitude, nous vivons une déconnexion dans notre vie à un point où nous devrions être connectés. C’est ce qui fait l’objet de l’avertissement. Le message est qu’il faut se reconnecter de peur de se faire du mal. Nous devons reconnaître la solitude et l’endroit où la déconnexion se produit avant de pouvoir choisir comment y remédier.

Les dimensions de la solitude

La solitude n’est pas simplement le fait de ne pas avoir une autre personne autour de nous, de ne pas être connecté à quelqu’un d’autre. Elle est plus complexe que cela. Nous avons tous des besoins fondamentaux en matière d’appartenance, de participation à quelque chose, de connexion, mais cela est multidimensionnel.

Il y a une dimension transcendante à cette appartenance dans laquelle nous avons besoin de nous sentir connectés à quelque chose de plus grand/plus grand que nous-mêmes. Que nous appelions cela Dieu, l’Être en général, la Force, importe peu ; même une cause qui nous aide à transcender les liens étroits de notre existence personnelle peut nous donner cette connexion transcendante. Il peut s’agir de tout ce qui nous fait nous sentir connectés à quelque chose de plus grand que nous-mêmes, qui contribue au sens et au but de notre existence et avec lequel nous vivons en harmonie. Lorsque cette connexion nous fait défaut, nous nous sentons seuls. Nous ressentons également la solitude lorsque nous rompons ce lien en nous comportant de manière incohérente ou contradictoire avec cette connexion, même si nous pouvons donner à cette solitude un autre nom, comme l’aliénation ou la culpabilité. S’il nous est si difficile de ressentir un manque d’intégrité à l’intérieur de nous-mêmes, c’est parce que nous nous sentons déconnectés. C’est la solitude.

Deuxièmement, la solitude comporte une dimension culturelle. Nous faisons tous partie d’une culture qui donne une orientation fondamentale à notre vie. C’est un système de valeurs, de croyances, de coutumes, de manières, de façons de faire les choses qui devient si fondamental pour nous que nous le prenons pour acquis et que nous avons tendance à le considérer comme la bonne, ou la seule, façon d’être et de faire. Lorsque nous nous éloignons de notre propre culture et que nous nous trouvons dans une culture radicalement différente, nous vivons un type de dislocation qui est en fait la solitude. Lorsque nous sommes déconnectés de notre culture, nous nous sentons seuls. C’est pourquoi les immigrants auront tendance à se chercher et à se regrouper dans des quartiers ou des clubs où ils se sentent « plus chez eux », c’est-à-dire moins seuls.

La solitude comporte également une dimension sociale. Nous avons tous besoin de sentir que nous sommes socialement acceptables, c’est-à-dire que nous avons une place dans la société, que nous sommes valorisés par le groupe social et que nous « appartenons ». Lorsque le groupe social, que ce soit la société dans son ensemble ou un groupe social plus restreint comme la famille, le diocèse, l’école, l’Ordre, vous trouve inacceptable, que ce soit en raison de votre sexe, de votre race, de votre nationalité, de votre comportement, de vos pensées, de votre orientation sexuelle, de votre âge ou pour toute autre raison, vous ressentez la solitude. La discrimination engendre la solitude, car elle qualifie les gens d’inacceptables, d’inférieurs, de non-appartenants. Nous avons besoin de nous sentir socialement connectés ; une déconnexion se produit lorsque ce groupe social nous marginalise ou nous frôle. C’est la solitude.

Enfin, la solitude comporte une dimension interpersonnelle. Il s’agit de la solitude que nous ressentons lorsque nous ne faisons pas partie de la vie d’une autre personne de manière significative, et que cette personne ne constitue pas une partie significative de notre vie. Lorsque vous vous posez la question « Qui se soucierait vraiment que je ne me réveille pas demain matin ? Quelle réponse obtiendriez-vous ? Je suis sûr que la personne qui devrait assumer votre charge de travail s’en soucierait, tout comme n’importe quelle autre personne qui aurait été gênée par votre disparition, mais qui s’en soucierait vraiment dans le sens où votre absence serait profondément et douloureusement ressentie ? Un pasteur populaire et prospère d’une grande paroisse m’a dit un jour “Chaque dimanche, il y a 40 familles où je pourrais aller dîner et chacune d’entre elles serait heureuse de m’avoir. Mais, vous savez, je ne manquerais à aucune d’entre elles si je ne venais pas”. À qui manquerais-tu si tu ne venais pas ?

Nous avons un besoin humain fondamental d’être connectés à une autre personne ; d’appartenir, en un sens, à quelqu’un. Chacun d’entre nous a la responsabilité de vivre sa vie de manière à maintenir et à entretenir ce lien avec les autres. Cela n’a rien à voir avec la chasteté ou le célibat ; cela a à voir avec l’intimité. La majorité des clercs agresseurs sexuels avec lesquels j’ai eu affaire n’étaient pas avides de sexe, mais d’intimité. Il en va de même pour les célibataires qui se sont comportés de manière à compromettre l’intégrité de leur engagement religieux ; ils se sont mis à faire des choses intimes avec un autre, alors que ce qu’ils recherchaient vraiment, c’était l’intimité avec un autre. Cela a très peu à voir avec le sexe. Comme Tolstoï l’a dit, nous recherchons l’intimité non pas parce qu’elle est nécessaire au bonheur, mais simplement parce qu’elle est nécessaire.

Permettez-moi de faire deux remarques sur l’intimité. Premièrement, je suis convaincu que chacun d’entre nous a besoin d’intimité pour maintenir sa santé émotionnelle. Cela ne veut pas dire que nous n’avons pas aussi besoin de solitude, mais ce n’est pas un problème pour la plupart des célibataires ; la formation et le maintien de relations intimes le sont souvent. Il est admis traditionnellement en santé mentale que de bonnes relations interpersonnelles sont la meilleure prophylaxie contre la maladie mentale. Karen Horney, l’une des pionnières de la théorie psychanalytique non orthodoxe, considérait toutes les névroses non pas comme le résultat de blocages dans l’expression des impulsions, mais comme “le résultat ultime de perturbations dans les relations interpersonnelles… sexuelles ou non”.

Permettez-moi d’aller encore un peu plus loin. Nous devons entretenir des relations intimes avec des personnes des deux sexes si nous voulons grandir et nous développer pleinement en tant que personnes. Cela touche maintenant plus directement à la troisième définition de l’ » intégrité ». En tant qu’homme, je dois être dans des relations intimes avec les hommes aussi bien qu’avec les femmes, et les femmes ont besoin de la même chose. Cela n’a rien à voir avec le fait que vous soyez marié ou célibataire, homosexuel ou hétérosexuel.

Il peut facilement y avoir une tension entre le besoin biologique d’expression génitale pour assurer la survie de l’espèce et le besoin psychologique d’intimité, mais vous pouvez avoir l’un sans l’autre. Une grande partie du problème actuel que nous connaissons autour du célibat est bien plus une question d’intimité qu’une question d’expression génitale. Si, dans le processus de garantie de l’intégrité d’un engagement de célibat, vous désavouez la proximité physique et l’intimité émotionnelle avec une autre personne, vous êtes dans le pétrin. Mais le problème ne réside pas dans le célibat, mais plutôt dans le célibat surchargé.

Le célibat est toujours une façon d’aimer, jamais une façon d’éviter l’amour, sinon il est non chrétien. S’il est considéré comme un moyen d’éviter l’amour, la plupart des gens le trouveront pénible, voire intolérablement difficile. Les seuls qui se satisferont d’un célibat évité sont probablement ceux pour qui le célibat est une nécessité en raison de leur propre handicap quant à la capacité de former et de maintenir des relations intimes.

Une deuxième opinion qui est à la base de notre discussion : ne pas être aimé par quelqu’un est une chose très douloureuse ; si personne ne se soucie de savoir si vous vous réveillez ou non demain, si personne ne vous manque quand vous n’êtes pas là, c’est triste. Mais aussi douloureux que cela soit, ce n’est pas le pire ; c’est tragique si vous n’aimez pas quelqu’un d’autre. Nous n’avons aucun contrôle sur le fait que nous soyons aimés ou non, mais nous pouvons être une personne qui aime. On entend tant de plaintes, surtout de la part des enfants, concernant le fait de ne pas être aimé, mais la question la plus vitale est de savoir qui j’aime, de qui suis-je un ami, de savoir à qui je donne la priorité dans ma vie en raison de mon amour pour cette personne. Lorsque nous parlons d’aimer une autre personne, d’être intime avec une autre personne, ce dont nous parlons, c’est d’être (et d’avoir) un ami. L’amitié est le modèle, pas le mariage, et la question importante n’est pas de savoir qui sont mes amis, mais plutôt de qui suis-je un ami. Pour paraphraser Mark Twain, la meilleure façon d’avoir un ami est d’être un ami.

Que signifie être un ami, aimer quelqu’un, être intime ? « Intimité » est en réalité une chose assez simple. C’est peut-être là que nous exprimons de la manière la plus pure l’impératif moral catégorique d’Emmanuel Kant, qui consiste à faire de l’autre une fin en soi, jamais un moyen. Dans l’amitié, l’amour, l’intimité, nous pouvons faire de l’autre personne une fin presque exclusive. L’autre est traité de manière non exploitante. Si l’amitié est réciproque, alors la prise en charge de l’autre est ressentie comme non-exploitante, et ainsi la sécurité si nécessaire à l’intimité est établie. L’amour présuppose de connaître l’autre et d’être connu par lui. Le mot « intimité » lui-même vient du verbe latin « intimare » qui signifie, littéralement, « amener ou mettre à l’intérieur ».

Pour être intime avec un autre, il est fondamental de permettre à l’autre d’entrer en vous, c’est-à-dire de vous connaître tel que vous êtes, avec vos verrues et tout le reste. Sans cette connaissance, aucune intimité n’est possible. Sans cela, le « Je t’aime » de l’autre ne peut pas pénétrer, car votre réponse sera probablement « Oui, mais si vous me connaissiez vraiment… ». Ce n’est que lorsque l’autre vous connaît vraiment que son amour a de la valeur. Ainsi, se laisser connaître est fondamental pour l’intimité, et s’il doit y avoir réciprocité, alors il faut connaître l’autre.

On poursuit souvent l’admiration alors que ce que l’on veut vraiment, c’est l’amour. Nous pouvons faire en sorte que les autres nous admirent en les amenant à nous considérer comme vertueux, beaux, intelligents, capables, plein d’esprit, ou tout ce pour quoi nous pensons que les autres nous admireront. Mais l’admiration n’est pas l’amour. On peut admirer une statue, mais on ne peut qu’aimer une autre personne et cela suppose que je la vois telle qu’elle est vraiment, sans tromperie ni fausse représentation.

Tout ce dont nous avons réellement besoin pour l’intimité, c’est de nous permettre d’être connus et de faire en sorte que l’autre reçoive cela sans porter de jugement. Si nous sentons que l’autre nous évalue, alors nous reculons et nous nous retenons, bloquant ainsi la formation de l’intimité. En nous permettant d’être connus, nous risquons d’être rejetés, ridiculisés ou de subir d’autres réactions négatives, ce qui nous place dans une position vulnérable. Le fait de rencontrer l’acceptation sans jugement de l’autre permet à l’intimité de s’épanouir. C’est le fondement d’une véritable amitié.

Lorsque vous avez permis à cette amitié de naître et de se développer, vous avez un engagement l’un envers l’autre ; cela implique des attentes pour l’autre et de la part de l’autre. Vous donnez une partie de vous-même en otage à l’autre et il a des droits sur vous, tout comme vous sur lui. Est-ce que cela signifie pour toute la vie ? Non, mais cela ne diminue pas la profondeur de l’engagement. Dans le film « Missing », il y a une scène où l’un de ceux qui se sont portés volontaires pour aller au Chili pour aider à la lutte pour la justice a été confronté par l’un des révolutionnaires chiliens pour leur manque d’engagement envers le peuple chilien. Il l’a dit à l’Américain : « Tant que vous vous promenez avec votre billet d’avion de retour dans votre poche arrière, vous n’êtes pas vraiment engagé pour le bien-être de notre peuple ». Ce n’est pas qu’il ait dû jurer de rester au Chili pour le reste de sa vie, mais le fait qu’il ait refusé de renoncer à la sécurité du billet d’avion dans sa poche a nié l’intégralité de son engagement. Peut-être que l’exhaustivité de tous nos engagements a plus à voir avec l’ouverture qu’avec la durée de vie ; où nous « déchirons » les garanties que nous gardons au cas où cet engagement ne fonctionnerait pas.

C’est dans ce sens de l’engagement que nous entrons en amitié. Nous ne savons pas où la poursuite de cet engagement fondamental pris lors de notre baptême va nous conduire demain, mais cela ne nous rend pas moins engagés envers les personnes et les valeurs de notre vie d’aujourd’hui.

Le sens de Dieu qui nous est donné dans la révélation de la tradition judéo-chrétienne est celui d’un Dieu qui nous invite à l’intimité. L’imagerie utilisée pour décrire la relation de Dieu avec les humains est celle de l’intimité, par exemple une mère avec son enfant, un amant avec sa bien-aimée, un père avec les enfants qu’il protège, une vigne vers ses sarments, etc. Dieu et moi sommes des amis intimes, et je l’exprime dans mes amitiés intimes avec les autres.

L'expérience de la sexualité

Quelle est la place de notre sexualité/génitalité ? Si vivre le célibat avec intégrité exige que nous ayons des relations intimes dans notre vie, éventuellement avec les deux sexes, comment faire face à ces pulsions érotiques ? La plupart d’entre nous veulent vivre leur vie dans l’honnêteté ; en tant que personnes “ordonnées”, vous êtes considérés par la communauté au sens large comme des défenseurs des valeurs de l’Évangile. Personne ne désire pratiquer la malhonnêteté de défendre une norme de moralité sexuelle qui ne soit pas respectée dans sa propre vie. Le faire serait de l’hypocrisie, et nous vivons à une époque où l’on a peu de patience avec l’hypocrisie.

Reconnaissons d’abord que le sexe n’est pas le seul moyen de faire de votre engagement public envers les valeurs de l’Évangile une hypocrisie. Ce n’est probablement même pas la plus importante. Il est certain que dans la poursuite de l’abondance, nous nous moquons de l’évangile qui prône la pauvreté ; l’utilisation inutile, ou l’abus, du pouvoir se moque de Celui qui a renoncé à tout usage du pouvoir. Si nous étions aussi préoccupés par les “péchés d’abondance” et les “péchés d’abus de pouvoir” que par les “péchés sexuels”, nous serions alors vraiment une force “révolutionnaire” dans le monde.

Cela étant, nous souhaitons toujours vivre notre sexualité avec intégrité. Il faut comprendre qu’il existe une tension naturelle entre les pulsions biologiques et les besoins psychologiques, qui se manifeste dès que l’on tente de restreindre l’expression biologique. Freud nous en a trop fait prendre conscience. Une grande partie de nos difficultés actuelles sont dues au fait que nous avons essayé de garder notre intégrité sexuelle en nous éloignant des “occasions de péché” (lointaines comme proches) sans tenir compte des besoins psychologiques qui étaient sacrifiés. Y a-t-il une meilleure solution ?

En tant que psychothérapeute, je trouve qu’une grande partie de mon travail consiste à aider les gens à se posséder, ou mieux, à cesser de rejeter des parties d’eux-mêmes. Chacun d’entre nous est unique et singulier ; il est impératif que vous soyez ce moi et que vous arrêtiez d’essayer d’être autre chose que ce que vous êtes. Si vous reniez une partie de vous-même, cette partie est susceptible de revenir vous hanter et l’arme qu’elle doit utiliser contre vous est la dépression. Les parties de vous-même les plus susceptibles d’être reniées sont celles qui ne répondent pas aux critères de bon, fort, sain, masculin ou féminin, aimable et aux attentes imposées de la même manière en matière de devoir ou d’opportunité qui surgissent dans notre culture. C’est souvent notre moi qui est en colère, ou notre moi qui est sexuel, qui est nié et renié. Ce qui rend l’appropriation de soi difficile, c’est un concept de “normalité” qui ne tient pas compte de la nature particulière de chaque personne.

Dans le domaine de la sexualité humaine, nous devons nous débarrasser de la notion de “normal”, non seulement parce qu’elle est inutile, mais aussi parce qu’elle est fondamentalement inconnue. Nous savons très peu de choses sur ce qui est “normal” en matière de sexualité humaine ; nous savons ce qui est illégal, contraire à l’éthique, voire immoral, mais nous ne savons pas ce qui est “anormal”. (Tout acte sexuel compulsif, ou idée obsessionnelle, est considéré comme pathologique, mais davantage en raison de la compulsivité ou de l’obsession, plutôt que de l’acte lui-même). Notre compréhension de la sexualité humaine est tellement imbriquée avec les valeurs sociales, culturelles, religieuses et historiques que nous sommes incapables d’abstraire une compréhension séparée de ces valeurs ; le seul “normal” que nous pouvons deviner est relatif. Ce que nous savons, c’est que la sexualité de chaque personne est unique et particulière. De plus, nous ne pouvons pas faire grand-chose pour la changer, car nos “cartes sexuelles” sont assez bien établies pour nous très tôt dans la vie. Ce que nous pouvons faire, c’est nous approprier notre propre sexualité et mettre notre comportement en accord avec notre société, notre moralité et nos attentes en matière d’engagement dans la vie. Mais cela commence par la maîtrise de soi.

Si nous renions notre sexualité pour tenter d'”être normal” ou, plus probablement, de “paraître normal”, alors il y aura des problèmes. Il n’y a probablement aucun domaine du comportement humain qui soit autant entouré de “devoirs” et de “droits” que l’expression sexuelle humaine, et la tentative de respecter ces devoirs et ces droits, non seulement dans le comportement mais aussi dans les pensées et les désirs, est souvent la source de nombreuses difficultés ou souffrances humaines. Tenter d’être ou d’apparaître “normal” est l’une des tyrannies les plus pernicieuses que notre société nous impose.

Chacun de nous est unique dans sa sexualité, et différent des autres. En outre, notre sexualité n’est pas une catégorie rigide, mais plutôt un mélange de nombreux sentiments et désirs distincts. Certains des éléments de ce mélange sont probablement qualifiés de “perversions” par quelqu’un. Chacun d’entre nous porte probablement en lui les morceaux (ou potentialités) de toute la gamme des moyens dont disposent les gens pour atteindre un orgasme. Chacun de nous a le potentiel de faire n’importe quoi. Tout cela est mélangé pour constituer notre “carte” ou “plan” sexuel unique.

La plupart d’entre nous vivent en conformité avec ce que l’on attend de nous dans notre expression sexuelle, et chacun d’entre nous a aussi un “côté sombre”.

Aucun d’entre nous ne peut regarder ses frères et sœurs accusés d’abus sexuels sans dire : “Il n’y a que la grâce de Dieu…” Dans chacun de nos propres “ragoûts sexuels” se trouvent les potentialités des comportements pour lesquels les autres sont punis. Soyez reconnaissant de la grâce que votre comportement se conforme.

Si vous estimez que votre sexualité est problématique ou si elle est source d’anxiété, d’inquiétude, d’émerveillement, ou si vous vous sentez en conflit avec des principes juridiques/moraux/éthiques, alors vous devriez chercher de l’aide à ce sujet. Parlez-en à quelqu’un ; si vous avez besoin d’une aide professionnelle, obtenez-la. N’oubliez pas qu’il y a très peu de problèmes sexuels, mais il y a beaucoup de problèmes humains qui s’expriment à travers notre sexualité. Cette “carte sexuelle” dont nous avons parlé est probablement immuable, mais vous pouvez faire quelque chose pour réduire les compulsions, pour mieux gérer les obsessions, pour faire face au pouvoir destructeur que peut exercer la sexualité. Cela implique très probablement d’affronter d’autres problèmes non sexuels dans votre vie, qui s’expriment dans le comportement sexuel, comme la colère, les blessures, le sentiment d’insignifiance, le besoin de pouvoir et de domination, la peur des relations, les effets de votre propre victimisation. Tous ces éléments peuvent être à l’origine de ce qui est exprimé dans le comportement sexuel.

Les sentiments de solitude et d’isolement affectif qui découlent de la façon dont vous essayez de vivre votre vie sont peut-être les plus importants dans les comportements sexuels problématiques. Mais la bonne nouvelle, c’est que l’on peut y remédier ; vous n’avez pas à être à la merci de vos comportements préjudiciables ou destructeurs. Une aide est disponible pour vous aider à mieux vous intégrer.

Je voudrais terminer ce document par une prière. Ce n’est pas ma prière, mais celle de Paul Tillich, prononcée à l’occasion de la célébration de son 60e anniversaire à l’université de Columbia. Je suis sûr que beaucoup d’entre vous connaissent les travaux de Tillich, qui est considéré par beaucoup comme l’un des meilleurs penseurs théologiques du XXe siècle. Je ne suis pas sûr que vous connaissiez bien la dimension tragique de sa vie personnelle, ses dépressions nerveuses, son divorce, sa lutte contre ses propres comportements sexuels et sa peur obsessionnelle de sa propre damnation. C’est peut-être en réfléchissant à ses propres luttes personnelles à cette étape importante de sa vie qu’il a parlé/prié sur le rôle de la grâce dans nos vies. C’est un message que je voudrais vous laisser.

« La grâce nous frappe quand nous sommes dans la douleur et l’agitation. Elle nous frappe lorsque nous marchons dans la vallée sombre d’une vie vide et sans signification. Elle nous frappe lorsque nous sentons que notre séparation est plus profonde que d’habitude, parce que nous avons l’impression d’avoir violé une autre vie, une vie que nous avons aimée ou dont nous étions séparés. Elle nous frappe lorsque notre dégoût pour notre propre être, notre indifférence, notre faiblesse, notre hostilité, notre manque de direction et de calme nous sont devenus intolérables. Elle nous frappe lorsque, année après année, la perfection de la vie tant désirée n’apparaît pas, lorsque les vieilles compulsions règnent en nous comme elles le font depuis des décennies, lorsque le désespoir détruit toute joie et tout courage. Parfois, à ce moment-là, une vague de lumière pénètre dans nos ténèbres, et c’est comme si une voix disait : “Vous êtes acceptés, acceptés par ce qui est plus grand que vous et dont vous ne connaissez pas le nom”. Ne demandez pas le nom maintenant ; peut-être le trouverez-vous plus tard. N’essayez pas de faire quoi que ce soit maintenant ; peut-être ferez-vous beaucoup plus tard. Ne cherchez rien, ne faites rien, n’ayez aucune intention. Acceptez simplement le fait que vous êtes accepté ».

Jésus, l’Homme de la rencontre

Jésus, l'Homme de la rencontre :

Huit jours à l'école du Maître dans l'évangile de Jean

P. Claude Rault, M.Afr.

Mgr Claude Rault, né en Normandie en 1940 est prêtre de la Société des Missionnaires d’Afrique (Pères Blancs). Après des études d’arabe et d’islamologie au PISAI à Rome, il a été envoyé en Algérie. Il a vécu près de 50 ans au Sahara, travaillant comme enseignant et chez un artisan de plateaux de cuivre à Ghardaïa. Vicaire général puis évêque de 2004 à 2017 de cet immense territoire, il visite les petites communautés chrétiennes dispersées et tisse des relations solides et fraternelles avec de nombreux musulmans. Actuellement, il est membre du Service National Français pour les Relations avec les Musulmans comme expert.

Dans son livre, Claude Rault médite sur la mission dans l’Évangile selon Saint-Jean : un évangile où ne figure qu’une fois le mot « évangéliser » mais où la mission de Jésus se déroule de rencontre en rencontre.

P. Claude RAULT
Maison des Missionnaires d’Afrique (Pères Blancs)
31 Rue Friant
75014 – Paris
France

émail: claude.rault.dz@gmail.com

Le prix est de 19 € + 5 € de frais de port, soit 24 €.

Nom du bénéficiaire : Claude Rault
Il vous sera envoyé dès que possible.
Merci de bien noter votre adresse pour l’expédition.

Plus d’info sur : http://www.peresblancs.org/livre_claude_rault20.htm

 

Unique Amour en Toi, Unique Amour en Tous

Unique Amour en Toi, Unique Amour en Tous

Père Jacques Cusset, M.Afr.

Il y avait « L’Amour au cœur du monde » dans les années 1990, récit purement autobiographique et de jeunesse ! Puis, il y a eu « Les chants de l’Amour », présentation biblique pour les temps qui courent, avec l’expérience de la catéchèse dans plusieurs paroisses de France ou d’ailleurs, à l’école de saint Augustin car « Chanter, c’est prier deux fois ». Mais quelqu’un m’a dit : « Tu devrais faire la synthèse » ! C’est ce que je propose dans cette nouvelle présentation de mon expérience de cinquante années de vie missionnaire aux quatre coins du monde : Algérie, France, famille, Angleterre, Canada, et Moyen-Orient de 1967 à 2020 ! Il est vrai qu’en alternant récits et chansons, en langage le plus simple possible, cela rend plus vivant le témoignage d’ensemble !

Cela conduit à un dialogue interreligieux vivant et simple. Là est pour moi l’essentiel ! De la prière à la vie quotidienne, des sommets du Djurdjura en Grande Kabylie à un laboratoire de chimie à Alger, d’une rencontre interreligieuse dans le cadre d’une paroisse en plein quartier populaire à Bordeaux ou à Montreuil-sous-Bois, ce qui compte, c’est le dialogue de la vie, et l’Esprit qui anime ce dialogue.

ISBN : 978-2-36452-577-1
format 160 x 240 300 pages
Novembre 2020
prix public TTC 20 €
SAINT-LEGER Editions

Prendre Contact avec le Père Jacques Cusset
7 rue du Moulin
95260 Mours
06 70 49 95 32
c_cussetjacques@orange.fr